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Marie-Aude Lanniaux
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De la méditation pour remplacer les heures de retenue !

« Ton carnet ! Une heure de colle lundi matin ! » : le lot des « retenus », «  des collés ». La question n’est pas de savoir si les heures de retenue distribuées aux élèves turbulents servent à quelque chose mais plutôt d’essayer de remplir ces heures de punition d’une pensée positive…comme de la méditation ! Une professeure de Jeumont qui enseigne également à l’université de Valenciennes s’y colle !

Qui a eu cette idée folle un jour …de remplacer les heures de retenue des élèves par de la méditation ?

Professeure de lettres dans l’éducation nationale, Marie-Aude Lanniaux, enseigne au collège Charles de Gaulle de Jeumont et à l’université de Valenciennes. Au premier, la jeune femme remplace les heures de colle par de la méditation. Idée surprenante ? Innovante ? Intéressante ? En tous cas, belle expérience.

Responsable, dans son établissement, du réseau Foquale, un réseau permettant de développer des mesures de remédiation au sein de l’Éducation nationale pour les élèves dits « décrocheurs », ou encore de recenser toutes les solutions existantes et favorisant la mutualisation d’expériences réussies, la professeure nous en parle «ces réseaux luttent contre le décrochage scolaire. J’ai pu échanger avec des adolescents fragiles sur le plan scolaire et moral. Les ados sont entiers et leurs humeurs sont parfois difficiles à gérer pour eux comme pour la famille et les enseignants. Derrière certaines bêtises voire l’insolence ou la violence, il y a clairement un malaise, une souffrance».

Oui mais alors la méditation est-elle une solution ?

Rendre les élèves turbulents plus calmes et attentifs, long chemin me direz-vous. Dans une école qui se veut être un lieu d’épanouissement et de sérénité. Alors la méditation est-ce LA solution ? Une solution ? Celle-ci en est une parmi d’autres, mais sincèrement avouons qu’elle est séduisante.

«La méditation n’est pas la solution mais une solution que j’ai expérimentée pendant deux ans avant de la mettre en place officiellement au sein de l’établissement. C’est un formidable outil pour prendre conscience de soi, de sa respiration, de ses sensations», explique Marie-Aude Lanniaux.

En France, la méditation pour les enfants se développe tout doucement. Comme le prouve le succès de la méthode néerlandaise Calme et attentif comme une grenouille, d’Elise Snel, qui d’ailleurs annonce son petit secret « le secret du bonheur …il suffit que vous constatiez que vous êtes heureux au moment où vous l’êtes».

De quoi aller voir si la théorie de cette pratique spirituelle se vérifie  ?

Comment ça marche ?

Sur les heures de retenue du lundi matin, Marie-Aude Lanniaux a commencé par de simples exercices de relaxation, puis, en 2015, sur les conseils d’une amie expérimentée, ce fût les débuts de la pratique de la pleine conscience, « avec l’excellente méthode d’Eline Snel, formatrice et thérapeute aux Pays Bas, publiée dans ses deux ouvrages « Calme et attentif comme une grenouille « pour les plus jeunes puis « Respirez » pour les grands ados». La pleine conscience, est un exercice, accessible à tout le monde, qui peut devenir quotidien; elle a pour but de prendre conscience du fonctionnement de l’esprit et de l’influence des pensées et des sentiments sur les réactions.

Les objectifs sont simples, créer des automatismes chez les élèves, afin «qu’ils appliquent au quotidien et de manière autonome la méditation et la pleine conscience. Que nos jeunes prennent conscience de ce qu’ils sont et de ce qu’ils sont capables de faire, plutôt que de  » coller » à une image qui ne les représente pas».

Marie-Aude a aménagé sa salle au collège pour bénéficier d’un espace spécialement dédié à la méditation. Ajouté à cela, un principal, Monsieur Malapel, immédiatement favorable au projet, un coup de pouce de Décathlon Louvroil qui a offert 25 tapis de sol, des collègues intéressés à la pratique et le tour est joué ! Une contagion du bien-être !

Comment se déroule une séance ?

La professeure se place avec ses élèves, elle leur demande de fermer les yeux et parle avec une voix douce, posée et rassurante. Les exercices proposés sont variés. Les élèves apprennent vite à apaiser leur tension. La progression et le changement sont rapides «très vite tous mes élèves, stressés, angoissés, inquiets ou parfaitement sereins, réclamaient les minutes de relaxation en début d’heure».

Et cerise sur le gâteau, cela se fait sans gêner en aucun cas, le suivi du programme scolaire. Marie-Aude Lanniaux a constaté «il y a quelque chose de formidable dans la méditation c’est qu’elle ne présente que des avantages: le bien-être de l’élève pendant et après l’exercice de méditation permet à la classe de travailler ensuite dans des conditions idéales. Les élèves sont très calmes physiquement, ils sont posés, relaxés mais très vifs intellectuellement. Ils sont sereins et travaillent sans stress, mieux et plus rapidement. L’ambiance classe est détendue et les élèves ne soufflent pas devant les exercices! Bien au contraire ! Les objectifs de séance visés sont atteints alors que dans une séance sans méditation, ce n’est pas toujours le cas».

Et les élèves, eux, qu’en pensent-ils  ?

texte 2775x425Les élèves ont écrit leur ressenti récemment sur un petit bout de papier, autant de témoignages du succès de la démarche. Joli florilège comme un cadeau pour l’enseignante: « Je me suis sentie bien, dans mon monde, j’étais extrêmement fatiguée et là tout va mieux », ou encore « merci pour la relaxation, je me sens apaisé», et celle-ci «j’ai imaginé cette petite lumière en moi. Elle me rend plus sereine, je suis relaxée, c’est agréable, ça enlève tout mon stress ».

Dorénavant, ces quelques minutes de méditation, ne sont plus réservés qu’aux élèves en difficulté ou en décrochage scolaire, «tous mes élèves le sont maintenant! Une fois par semaine, mes cours commencent par 5 à 10 minutes de méditation. Et dès la rentrée de la Toussaint, tous les lundis , les heures de retenue seront remplacées par de la méditation».

Comme une petite graine qui pousse et qui, pourrait être semée par ces mêmes élèves, à leur enfant dans quelques années. Et qui sait ? Le monde deviendra-t il meilleur ? Pierre Rabhi a raison «tout le monde est formaté, comme dans une sorte de coma». Pour sortir de là, il faut laisser naître des idées innovantes portées par des passionnés. Chacun peut apporter sa petite goutte, sa petite graine, à la fameuse légende du colibri. Alors nous aurions, peut-être, les moyens de changer le déroulement de l’histoire. Et si nous entendions et passions à nos enfants autre chose que ces messages de désastre, que l’on nous assène quotidiennement. Et si nous regardions, enfin, l’autre côté des choses, celui d’où l’on aperçoit des notes d’espoir…

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