1. Accueil
  2. Territoire
  3. Election européenne du 26 mai, un défi pour les partis politiques français
Territoire

Election européenne du 26 mai, un défi pour les partis politiques français

Dans 8 jours, les électeurs européens vont envoyer à travers un scrutin proportionnel, à un seul tour, les futurs députés au sein du Parlement européen. Une lecture des derniers sondages (tout en précisant qu’une marge d’erreur de +2 -2 est possible) est très instructive sur les enjeux majeurs pour chaque formation nationale.

Revue des troupes… politiques avant les européennes !

Le Rassemblement National :

En 2014, le Front National l’emporte facilement avec 24,86 %, dont un score écrasant dans le département du Nord de 32,80%, reléguant à plus de 4 points le deuxième au niveau national, en l’occurrence l’UMP a 20,81%. La participation fut très faible avec 43,09% de votants dans le cadre d’un scrutin pour des listes régionales. Cette fois, rappelons que des listes nationales sont en lice, pas moins de 34. Une abstention plus forte encore qu’en 2014 serait un camouflet pour toute la classe politique française sans exception, voire une victoire à la Pyrrhus quel que soit le premier parti européen français.

Concrètement, Marine Le Pen avait remporté une victoire incontestable en 2014. Par contre, elle n’a pas su convaincre des alliés européens afin de structurer une voix populiste au sein du Parlement européen. De facto, au niveau de ses votes, le Front national, puis le Rassemblement national, s’est opposé à tous les textes, voire s’est abstenu massivement même concernant le fichier SIS (Fichier Schengen) afin de répertorier les individus dangereux. Jordan Bardella, tête de liste RN, rame comme un fou pour effacer cette réalité d’un choix de vote totalement incompréhensible sur le fond, même si ce fichier SIS était imparfait.

Cette fois, l’enjeu est tout autre. En effet, des leaders populistes ont émergé en Autriche, Hongrie, Pologne, voire en Italie avec le fameux Mateo Salvini. Marine Le Pen essaye, comme hier à Milan, de s’agréger à une future force d’opposition populiste européenne face aux deux grands partis en place, le PPE (Conservateurs), et le PSE (Sociale Démocrate), voire les Verts. Clairement, elle a raté à titre personnel une alliance autour de son nom en 2014, elle joue la carte le la locomotive italienne Salvini. A noter tout de même une Grosse note discordante, Mateo Salvini crie haut et fort que les autres pays ne prennent pas leur part dans l’accueil des migrants, plaçant la France de fait devant ses responsabilités ; alors que Marine Le Pen fait de l’immigration en provenance de l’Afrique son cheval de bataille. Vu sa performance au débat entre les deux tours de la présidentielle, on peut s’interroger sur sa capacité à résister à Matéo Salvini… !

En fait, soyons transparents, les grands partis populistes européens hors de nos frontières, voire un certain nombre d’électeurs du Rassemblement National, attendent l’avènement de Marion Marechal (Le Pen). Peu importe ce qui resort de l’isoloir, où ce sera une défaite précipitant la fin de du règne de Marine Le Pen sur le RN en France, où cela pourrait être un bâton de Maréchal (!!!), car beaucoup pensent qu’elle n’a aucune chance sur l’échiquier politique national. C’est tout le contraire de Marion Marechal, préparant tranquillement son retour depuis le bureau d’une directrice d’école très singulière, mais surtout symbolisant d’autres tendances chez le Rassemblement National.

La plus connue est sur le plan économique, pour Marine le Pen, son hémisphère droit en la matière était Florian Philippot basant toute sa ligne politique sur la sortie de l’Euro. Le constat de l’impopularité de cette mesure par Marine le Pen l’a conduit à revoir sa copie, mais elle n’a pas présenté un nouveau fil rouge économique sur le sujet, des incantations ne suffisent jamais, on le voit chaque jour en terme industriel.

Ensuite, c’est plus tabou. L’approche de la religion était un point de discorde hier, et peut-être aujourd’hui encore entre Marine Le Pen et Marion Marechal. « L’arrivée de Marine Le Pen au pouvoir serait un moment de forte tension avec l’église catholique. Par contre, Marion Marechal n’a jamais caché sa pratique religieuse », disait un homme d’église avisé du Valenciennois. Oui, Marion Marechal est Laurent Wauquiez compatible, et inversement ! D’ailleurs, ils le savent tous les deux, le temps d’un parti de droite avec une fusion assumée entre ces deux formations passent par la fin de règne de Marine Le Pen. Une droite qui a fait gagné largement François Fillon à la primaire en 2016 concernant une élection présidentielle imperdable pour la droite. Et on s’étonne de l’inclinaison à droite d’Emmanuel Macron, car c’est c’est tout simplement dans la majorité de l’électorat qu’il faut capter des voix, la belle affaire, c’est de la politique ! Le bal des convictions politiques s’est terminée depuis des décennies, il faut être lucide !

La République En Marche  + Modem

Pour le parti de la majorité gouvernementale et de son allié opportun durant cette élection, le Modem, cette élection européenne est tout sauf une échéance de plus sur le calendrier. Difficile pour un candidat qui a eu le courage à l’époque d’agiter sa foi européenne, durant la campagne nationale, de l’observer d’un regard obséquieux. C’est pourquoi, le Président de la République, Emmanuel Macron, se jette à corps perdu dans cette bataille européenne. Effectivement, il fait voler en éclats le principe d’une certaine distance du président en exercice face à une échéance intermédiaire entre les deux présidentielles. Cela étonne, mais si peu lorsque l’on regarde de plus près. Les partis politiques plus anciens ont des racines locales, territoriales, qui font cruellement défaut à LREM. Par porosité, la voix de Nathalie Loiseau n’est pas véhiculée sur tous les territoires, hors militants, il apparait donc indispensable que la voix du Macronisme soit portée par Emmanuel Macron himself.

Sur le fond, cet engagement est logique compte tenu de son projet européen. Trop passé sous silence, les députés élus sour l’étiquette LREM/Modem pourraient (si possible) essayer de constituer une nouvelle force au sein du Parlement européen, voire potentiellement l’UDI dont nous reparlerons ci-après. Il faut le rappeler au lecteur, il n’existe pas de majorité politique au sein du Parlement européen. Donc, chaque loi fait l’objet d’un compromis d’où une certaine lenteur législative parfois. Ce nouveau groupe va travailler dans ce temple de la négociation afin de rallier, projet par projet, des alliés de circonstance face au PPE, au PSE, et surtout face au mouvement populiste plus fort en 2019 qu’en 2014. Est-ce le bon choix ? Par contre, factuellement, on déplore les dysfonctionnements de l’Europe, voire son inertie avec la pratique d’hier, faut-il faire autrement ou rester les bras croisés devant des pratiques surannées !

Néanmoins, si LREM/Modem termine deuxième, ne serait ce que d’une voix, le Président de la République devra appuyer sur le bouton du siège éjectable du premier ministre. L’excuse de l’abstention ne suffira pas, car elle voudra dire également qu’aucune proposition n’est assez séduisante pour ce déplacer dans l’isoloir, majorité comprise !

Les Républicains

Le parti de Laurent Wauquiez a lancé un candidat inconnu au bataillon, mais il fait de son mieux pour fédérer les courants, nombreux, d’une droite républicaine en quête d’identité. Le mouvement Juppé, Sarkozy, Fillon, les courants sont multiples, et les divergences s’accrochent plus sur la personne de Laurent Wauquiez que le programme lui même. Juppé, Rafarin, Pecresse, Bertrand, la liste des poids lourds de droit ne supportant pas sa porosité assumée aux idées du RN est trop longue à résumer. Pour autant, le parti LR maintient son cap. Il sait pertinemment que cette élection n’est qu’une étape pour elle, l’heure de la fusion avec l’extrême droite est devant elle. Ils attendent juste que Marine Le Pen passe son chemin… !

Sur le fond, le programme de François Fillon, première mouture, colle bien à la ligne politique défendue par François-Xavier Bellamy.

L’Union des Démocrates et Indépendants

Pour finir cette lecture d’un électorat d’un coté de la montagne, pour être franc, j’ai du retaper sur google la signification du sigle UDI, l’Union des Démocrates et Indépendants, tellement difficile à saisir politiquement depuis le départ de Jean-Louis Borloo. Si François Bayrou, malgré son égo, a eu le nez creux en ralliant Emmanuel Macron avant le 1er tour de la présidentielle, Jean-Christophe Lagarde a très mal négocié pour son parti le rapprochement avec le programme de François Fillon, et ses 500 000 suppressions de fonctionnaires. Certes, il y a des élus UDI, mais la crédibilité de ce parti est aux oubliettes, version Louis XI.  Aujourd’hui, son retour vers le parti au pouvoir fait sourire, elle image parfaitement la chanson mythique de Jacques Dutronc.

Sur le fond, il y a très peu de différences entre la ligne de l’UDI et LREM/Modem. En résumé, pourquoi voter pour une liste UDI qui fera un score de plus ou moins 1 à 3%, donc sans élus européens (minimum 5%), plutôt que pour la liste LREM/Modem, c’est une question que chaque électeur de l’UDI doit se poser.

Au niveau local, en 2020, pour beaucoup de maires, la proposition d’une investiture UDI éventuelle pourraient se transformer par une réponse tout en subtilité d’un candidat …« je peux pas, j’ai piscine ! ».

La France Insoumise

Là, le charismatique Jean-Luc Mélanchon joue énormément sur le résultat pour FI sur cette échéance électorale, ce qui ne devrait pas être au demeurant. Pour autant, ces coups d’éclats, son mode de gouvernance interne très décriée font d’un vote pour ou contre France insoumise un vote personnel contre l’homme, Jean-Luc Mélanchon, beaucoup plus que contre les idées de la France insoumise, c’est un problème pour FI.

Sur le fond, le programme de la France Insoumise a peu varié par rapport à sa plate-forme nationale. Une thématique forte sort du lot, la planification écologique devrait être le moteur de toute politique européenne, c’est le bon niveau d’une action face au défi climatique. Pour ce qui concerne l’harmonisation fiscale, il fait consensus aujourd’hui, dans tous les partis, que l’évasion fiscale est une lèpre pour les budgets nationaux.

EELV (Europe Ecologie les Verts)

Comme pour l’élection présidentielle, EELV joue la carte solitaire. L’accès aux fonctions régaliennes de l’Etat n’est pas un gage de mutation écologique, échec constaté à plusieurs reprises. Dans cette optique, partir seul afin de rallier un parti « Vert » beaucoup plus fort au niveau du Parlement européen, qu’en France, semble être la meilleure option d’un courant politique limité sur l’échiquier national.

« Envie d’Europe »

L’initiative de combattre l’émiettement de la gauche faisait sens, presque une évidence à la lecture du paysage politique post 2017. Si le début de l’initiative pouvait faire croire à un soubresaut de gauche, que nenni, seuls quatre partis de gauche ont rallié cette liste « Envie d’Europe ». Pour cette liste, l’équation est simple… Où elle atteint le seuil des 5% avec des députés européens à la clé, où elle est en dessous avec un Parti Socialiste moribond, quasi en soins palliatifs. Toutefois, il existe une fenêtre de tir, et il est difficile de reprocher une tentative de stratégie gagnante à un choix perdant de facto.

Mais où sera Benoît Hamon ? L’addition des scores de gauche et affinités sera instructif à l’issue de cette élection européenne. Heureusement, le ministre de l’Education nationale a relancé la pratique du calcul mental à l’école élémentaire, car visiblement 1 +1 +1 +1 +1 = 1 pour la gauche, élémentaire mon cher Watson, magnifiquement donquichottesque !

Le Parti Communiste Français

Dur campagne politique où la tête de liste essayer de fédérer des électeurs au niveau d’une campagne européenne. Autant, grâce à leurs implantations dans les collectivités locales, le Parti Communiste a toute sa place dans l’échiquier des municipales 2020 ; là, le niveau de l’échéance européenne sera très sévère et sans pitié pour une formation qui aurait eu tout intérêt à s’agréger avec un ou plusieurs partis politiques pour le 26 mai prochain.

Nicolas Dupont-Aignan

Nicolas Dupont-Aignan paye cher son ralliement à Marie Le Pen entre les 2 tours de la présidentielle. Si son score n’atteint pas les 3%, il ne sera même pas remboursé des frais de campagne, il se pourrait que cela soit le crépuscule de cet homme politique. Le RN lorgne sur son électorat même si Marine le Pen, la personne plus que les idées, pose problème pour ces derniers.

Deux listes gilets jaunes :

C’est le sel d’une démocratie. Tout le monde peut se fédérer pour présenter une liste, 34 sont d’ailleurs sur la ligne de départ pour ces européennes. Ces deux listes ont donc choisi les urnes pour représenter leurs idées très hétérogènes. Aucun programme politique d’une formation en lice ne reprend dans l’intégralité leur revendications, malgré les gesticulations de certains partis, elles s’expriment donc légitiment à travers deux listes, la démocratie des urnes plutôt que la violence, c’est nettement mieux. Cela mériterait un 3%, histoire de se voir rembourser les frais d’une campagne qui a duré depuis 7 mois.. D’ailleurs, depuis quand il y aurait une quelconque honte à être minoritaire politique (et pacifiquement) dans une démocratie ?

Cette présentation des listes est non exhaustive, non par mépris de toutes les autres, mais par méconnaissance de tous les programmes politiques aussi divers que variés pour cette élection européenne où voter le 26 mai 2016 s’avère fondamental !

Daniel Carlier

Print Friendly, PDF & Email
Articles Similaires