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Yvon Riancho, la nouvelle donne à Denain

Au sein d’un territoire doté de 82 communes, Denain, la deuxième ville du Valenciennois, est emblématique du paysage politique extrêmement complexe issu directement de l’élection présidentielle 2017. Pourtant à Denain, il n’y aura pas plus de candidats qu’ailleurs, mais les partis devront résoudre l’équation politique la plus complexe du Hainaut. Entretien avec Yvon Riancho, acteur politique aguerri et candidat sur cette commune.

Municipale, l’élection la plus importante du XXIème siècle pour Denain

Fin août, le momentum politique est (enfin) arrivé ! La campagne municipale va de fait battre son plein dans les semaines à venir, les candidatures se préciser, les listes des candidat(e)s se dévoiler complètement, surprenantes ou attendues…les alliances politiques vont se révéler. Le 15 et 22 mars 2020, la démocratie locale va s’exprimer afin de choisir un(e) maire pour les six prochaines années. Cette échéance de proximité constitue un enjeu fondamental pour les citoyen(nes), car la politique de terrain à l’immense vertu de répondre à des besoins précis, concrets, quotidiens, l’action locale au coin de la rue.

Sur la deuxième ville du Hainaut, même la succession du regretté député à la veste rouge, Patrick Roy, n’avait pas suscité autant d’ambitions locales. En effet, en 2020 à Denain, cette élection les yeux dans les yeux sera à minima un événement régional pour ne pas dire plus… ! En effet, on ne va pas se mentir, le Rassemblement National avec une liste poussée par Sébastien Chenu est largement favori sur le papier. Toutefois, rien n’est écrit d’avance en politique, la présidentielle 2017 impose une humilité à tous les experts en la matière. La première question est simple, l’élection sera-t-elle sur deux tours ? Compte tenu des résultats des législatives 2017 et des européennes 2019, cette donnée n’est pas gravée dans le marbre ! Ensuite, qui sera en face du Rassemblement National dans l’hypothèse d’un deuxième tour ?

Yvon Riancho : « Entre le populisme d’Anne-Lise Dufour et le populisme de Sébastien Chenu, je suis la 3ème voix républicaine »

Enseignant durant 20 ans sur Denain avec des collègues comme Patrick Roy (ancien maire et député) et Daniel Cotton (1er adjoint actuel), Yvon Riancho, 57 ans, est aujourd’hui directeur d’école. Dans les années 90, ses collègues enseignants, notamment Patrick Roy, l’ont converti à la politique « compte tenu de mes sensibilités de gauche. Je suis arrivé sur Denain en 1995, et adhéré au Parti Socialiste en 1998. Rapidement, je suis devenu secrétaire de section pour la 19ème circonscription », entame Yvon Riancho.

Chemin faisant, il participe au plus près à la reconquête par Patrick Roy de la mairie, mais également à la campagne législative victorieuse. Enfin, durant le mandat de 2008, il fut un des adjoints très en vue à la municipalité de Denain, très proche d’Anne-Lise Dufour, un élu communautaire pointu notamment avec une intervention remarquée au SIPES en février 2014 (le D-Day sur le sujet) contre l’installation d’Auchan sur la commune de Marly, mais également au sein du Comité syndical du SITURV (aujourd’hui SIMOUV) relatif au transport public.

Enfin, en 2014, il s’inscrit dans la campagne municipale sur la commune voisine de Douchy-les-Mines, il échoue face au pilier local du PCF, Michel Lefebvre, un jour élu, un jour battu. Fort de tout cela, on peut affirmer avec une grande objectivité deux points. Yvon Riancho est un homme rompu à la politique locale et communautaire, de surcroit fin connaisseur du modus operandi des partis politiques, mais surtout un denaisien dans l’âme depuis 1995. L’époque où le candidat à une municipale devait présenter un passeport avec minimum 3 générations familiales sur la commune est aussi vétuste qu’une publicité de Jean Mineur… !

En 2019, on demande à un maire d’agir pour la population locale, point final. Comme disait un acteur bien connu dans une série française qui a défrayé la chronique par sa cruelle vérité « le Baron Noir » : « On ne vous demande pas d’être pauvre, mais d’agir pour les pauvres ! »

Candidat sur la ville de Denain pourquoi ?

D’aucuns pourraient croire qu’Yvon Riancho a fait le job, que son temps politique est révolu. Lui ne l’entend pas de cette oreille. Premièrement, comme tout le monde, il a pris la mesure d’une élection présidentielle 2017 emprunte d’un dégagisme criant, des mouvements sociaux et/ou spontanés bousculant le fonctionnement (lourd) d’un parti politique voire du militantisme tout court, mais surtout « je souhaite travailler l’humain. Sur le volet réalisations (bâtimentaires), ce serait mentir que de dire qu’Anne-Lise Dufour n’a rien fait. Par contre, l’humain est oublié. On ne fait pas le bonheur des gens sans prendre en compte leur avis. Sur ce point, la politique d’Anne-Lise Dufour est un échec. Il faut redonner une vision des quartiers par les habitants », explique le candidat. L’horizon local d’Yvon Riancho est de travailler l’humain dans les différents quartiers de Denain, notamment à travers un volet financier plus autonome « contrôlé et maîtrisé », précise-t-il.

« J’ai respecté les militants », Yvon Riancho

Sur un plan purement politique, Yvon Riancho est dans la mouvance de Patrick Kanner, ex ministre des sports et de la jeunesse, contrairement à Anne-Lise Dufour sous la bienveillance de Martine Aubry depuis bien longtemps. Traduction durant la présidentielle 2017, Anne-Lise Dufour a affiché son soutien à Benoit Hamon, Yvon Riancho à Manuel Valls. Cela n’explique pas tout, mais ce n’est pas neutre non plus.

Face aux médias décriés par la majorité du monde politique, la vitesse d’une information (quand ce n’est pas une fakenews) a converti les acteurs politiques à utiliser la même réactivité, on tourne le dos à tout ce que l’on a fait, partagé, pas de prisonniers, tué (politiquement) ou être tué, une tranche de vie rayée… d’un trait via un texto, un mail, voire les réseaux sociaux. Face à cela, Yvon Riancho l’a joué « Old school ».  Il insiste sur son respect des institutions du Parti socialiste. « J’ai d’abord rencontré Anne-Lise Dufour pour lui signifier ma candidature, sans chantage ni aucune demande, c’était une marque de respect compte tenu de notre parcours politique commun. Ensuite, auprès des instances politiques où Martine Filleul (patronne du P.S du Nord) était présente, comme Anne-Lise Dufour, pour indiquer que je ne participerai pas à une primaire en octobre 2019. De fait, le P.S a acté ma démission du parti. Enfin, auprès de la section de Denain et surtout des personnes qui ont milité avec et pour moi durant de nombreuses années afin de leur expliquer ma position. J’ai respecté les militants », précise-t-il.

« Anne-Lise Dufour cale sa politique sur le Rassemblement National », Yvon Riancho

Bien sûr, la question récurrente posée à Yvon Riancho est évidente. « Êtes-vous celui qui va faire perdre Anne-Lise Dufour face au Rassemblement National ? ». Sa réponse est sans ambiguïté : « Je ne ferai perdre personne. Si au 1er tour, des alliances sont possibles (hors Anne-Lise Dufour et Sébastien Chenu) à travers un véritable projet local, au second tour, si je n’y suis pas, je n’apporterai mon soutien ni au RN, ni à la liste conduite par Anne-Lise Dufour », plante-t-il tel un décorum immuable. Sur ce point, la mémoire politique est fondamentale. La législative 2017 a laissé une trace indélébile dans l’esprit des « Marcheurs ». « Anne-Lise Dufour a attendu le mercredi pour appeler à voter en faveur de la candidate soutenue par LREM, elle aurait dû le faire dès le dimanche soir. En fait, je me suis exonéré de tout cela, de cette logique d’appareil politique que les françaises et français ne veulent plus. Le spectre du RN ne peut souffrir d’un manque de démocratie », lance-t-il. Encore un point d’amertume et d’une profonde rupture politique avec Anne-Lise Dufour, le Front Républicain… c’est fini au 1er comme au second tour en 2020, il faut arrêter de réfléchir comme dans les 20 dernières années. Il est impératif, pour les opposants féroces au RN dans les différentes communes du Valenciennois, de construire une politique locale ambitieuse et de proximité, déjà engagée ou pas !

Sur le volet social, Yvon Riancho rappelle le dossier complexe de l’ADASE, voire différentes initiatives d’Anne-Lise Dufour peu compatibles avec sa fibre de gauche. « Anne-Lise Dufour a choisi le tout sécuritaire à travers sa police municipale et les caméras vidéos en réponse à la présence du Rassemblement National. Sur plusieurs sujets, elle cale sa politique sur le Rassemblement National. Entre le populisme d’Anne-Lise Dufour et le populisme de Sébastien Chenu, je suis la 3ème voix… républicaine. Anne-Lise Dufour est dans la stratégie politique, moi dans l’élaboration d’un projet citoyen avec les Denaisiens », poursuit le candidat à l’élection municipale en mars 2020.

Des élus locaux et intercommunaux

Dans le mode de gouvernance locale, Yvon Riancho décortique le travail des élus. « Les habitants des différents quartiers de la commune doivent participer à la co-construction d’une politique locale. Par contre, l’aménagement et la vision du territoire appartiennent aux élus communautaires. Je ne suis pas choqué quand le maire de la ville la plus importante d’une agglo devient président de la dite intercommunalité », ajoute-t-il. Il confirme une évidence politique territoriale « la fusion des deux agglos (Valenciennes Métropole et la Porte du Hainaut) est inéluctable ». Par contre, de manière pragmatique, cela constituerait une diminution à l’horizon 2021 de 50% des postes de vice-présidents etc., pas simple à gérer.

« Au niveau local, j’insiste sur la complémentarité des élus dédiés à la politique locale et des élus communautaires véritablement investis à travers une parfaite connaissance de leur dossier. Comment l’épisode (très médiatisé) de la hausse (lourde) de la CFE (Contribution Foncière des Entreprises) sur la Porte du Hainaut a été possible, restons sérieux ! », assène Yvon Riancho. Enfin, il ne cache pas son intérêt très aiguisé par la politique du maire de Grande-Synthe, indéniablement engagée que l’on apprécie ou pas !

Voilà l’histoire d’une candidature pas comme les autres, dans une ville où l’issue du scrutin sera d’une portée insoupçonnée, un enjeu tout juste subodoré au plus haut niveau dans un paysage local où les partis historiques sont bousculés dans leurs convictions les plus profondes, bref… c’est sauve-qui-peut ! Denain sera véritablement l’entracte politique localo/national entre les deux élections présidentielles 2017 et 2022.

Daniel Carlier

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