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Jean Thevenot… « aucune avancée sur la réforme »

Cette semaine est marquée par une levée de boucliers de l’ensemble de la corporation des avocats contre la réforme potentielle de leur régime spécial. Emmené par le bâtonnier de Valenciennes, Jean Thevenot, les avocats du barreau de Valenciennes manifestent toute cette semaine sous des formes diverses et variées leur exaspération.

Jean Thevenot : « Quelle profession accepterait un deal pareil ? »

Devant la Poste, Place du Marché aux Herbes, une trentaine d’avocats étaient présents pour déambuler vers la CPAM « où nous allons poser des questions sur le versement de la retraite à un avocat, quelle date dans le mois, combien etc. Cela risque d’être un peu long », précise avec un sourire indicible le bâtonnier. Cette action s’inscrit dans une semaine d’actions tous azimuts du « jeté de la robe », au report de tous les dossiers au tribunal, etc. Des initiatives toujours pacifiques, mais percutantes sur la signification du message.

L’état des lieux du dialogue entre les avocats et la Garde des Sceaux est au point mort. Pire, les intéressés ont l’impression de remettre le vinyle en permanence… « Nous échangeons depuis plus de deux mois sur nos revendications avec le Ministère de la Justice. Aujourd’hui, on nous demande d’exposer nos doléances comme si nous n’avions jamais discuté déjà de toute cela ! », entame le bâtonnier furibond.

L’enjeu est assez clair. Le régime de retraite des avocats est autonome. « L’Etat veut simplement piquer le pognon que nos anciens ont économisé année après année. Nos anciens ont mis de coté une réserve de 2 milliards d’euros collectés intégralement par les cotisations des avocats. Cette réserve, plus les cotisants actuels, assurent un régime de retraite jusque 2079 », expose l’avocat. Certes, c’est un régime spécial, mais il ne revendique qu’une seule chose, l’indépendance de son régime de retraite qui ne coûte pas un euro d’argent public. Ceci constitue un point central dans cette discussion où tous les régimes spéciaux ne sont pas dans cette configuration budgétaire créditrice.

La petite musique clouant au pilori les avocats pour leur absence de solidarité n’est pas du tout du goût de la profession… En effet, la contrepartie n’est pas non plus enthousiasmante pour le professionnel du droit. « Chaque avocat devra cotiser 28% au lieu de 14% aujourd’hui. Enfin, il passera d’une indemnisation de retraite de 1 400 € à 1 000 €…  Quelle profession accepterait un deal pareil ? », poursuit Jean Thevenot.

Assurément, cette réforme voulue par l’exécutif apporte des réponses postives à des professions comme les agriculteurs bénéficiant d’une retraite indécente, voire des carrière hachées comme souvent pour les femmes. mais en l’espèce, cette profession a fondé son propre régime de retraite. « C’est une rupture du contrat social que cela soit pour les avocats, voire d’autres professions où les professionnels se sont engagés avec des acquis sociaux à la clé », poursuit Jean Thevenot.

Si cette réforme voit le jour, elle aboutirait à réduire le nombre de professionnels, et plus spécialement  « la disparition des petits cabinets d’avocats. En effet, il y aurait de moins en moins d’aide juridictionnels. Ensuite, les grands cabinets comme la Fidal sont de la partie, car ils savent également qu’ils ne pourront jamais répercuter 20 % de hausse des honoraires sur leurs clients », commente Jean Thevenot.

Modernisation ou éloignement du justiciable ?

Outre cette réforme, la loi « J21, la loi de modernisation de la justice » arrive en application au 01 janvier 2020 avec des décrets d’application passés en décembre 2019. Voilà quelques mesures dont la portée est sismique dans l’exercice du métier d’avocat au quotidien.

« L’exécution provisoire au 01 janvier…», Jean Thevenot

Grande nouveauté en application dès ce 01 janvier 2020… «  la mise en exécution provisoire d’un jugement civil… Cela va réduire drastiquement le recours en appel puisque le justiciable aura déjà payé », ajoute Jean Thevenot. Une modalité visant à réduire les procédures, l’engorgement des tribunaux etc., mais cette dernière n’est pas anodine en matière de justice dans un Etat de Droit.

« Pas de banque dans le capital d’un cabinet », Jean Thevenot

Autre mesure choc concernant cette profession, un organisme bancaire pourrait devenir actionnaire d’un grand cabinet d’avocats. « Peu à peu, au départ en retraite des avocats associés, la banque prendra le contrôle des cabinets d’avocats », ajoute le bâtonnier. Dès cet instant, il faudra espérer la présence dans l’actionnariat du Crédit coopératif plutôt que la banque Lehman Brothers… !

Pour résumer en quelques mots la pensée partagée de toute une profession, une petite pointe d’humour en reprenant la saillie de la journaliste Lea Salamé à l’endroit du Président de la République, François Hollande… « C’est une plaisanterie ! »

Daniel Carlier

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