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Le confinement, une épreuve psychologique bénéfique pour les familles ?

Situation inédite, conséquence difficilement quantifiable, le sujet de l’adaptation de la cellule familiale en mode confinement s’est installé dans tous les foyers français. L’Homme, cet animal social, est donc confronté à une problématique imprévue ! Va-infos s’est entretenu avec Emeline Dautreaux, psychologue installée depuis 2006 à Valenciennes.

Emeline Dautreaux: « Le présentiel permanent supprime tous les échappatoires »

Installée sur Valenciennes en cabinet libéral avec plusieurs professionnels psychologues, Emeline Dautreaux fut confrontée a ce coup d’arrêt économique pour cause sanitaire le lundi 16 mars. « Pourtant, nous n’étions pas obligés de fermer notre cabinet. Toutefois, compte tenu des reports de rendez-vous, et des mesures sanitaires indispensables, il n’était plus possible d’accueillir la patientèle », explique la psychologue.

Donc, l’activité s’est reportée partiellement vers la téléconsultation. « Avec mes collègues psychologues, nous recevons 100 à 120 patients par semaine au cabinet. Sauf situation exceptionnelle comme un déménagement, une indisponibilité physique, la téléconsultation était à la marge. Aujourd’hui, nous avons quand même 30 à 40% de nos patients qui ont choisi de continuer en téléconsultation. Je suis très surprise par le choix de certains patients dont je n’imaginais pas le besoin de suivi, et d’autres très dépendants qui n’ont pas voulu recourir à ce dispositif », indique-t-elle.

Cette remarque introduit parfaitement le sujet de ce reportage. Quels sont les changements dans les rapports familiaux durant cette période de confinement et les impacts psychologiques ?

Tout d’abord, des plates-formes dédiées aux questions, inquiétudes… sur le Covid-19 sont disponibles. « Je travaille à mi-temps sur une plate-forme, elles sont parfaitement opérationnelles sur toutes les informations liées au Covid-19 », souligne-t-elle.

« L’après Covid-19 », Emeline Dautreaux

Bien sûr, nous ne parlons pas des personnes avec un membre de leur famille infecté par le Covid-19, naturellement très angoissé et perturbé, ni des parents devant gérer un enfant en situation de handicap où le confinement peut s’avérer catastrophique, etc. ! Nous abordons, pour le plus grand nombre, le cas de la cellule familiale confinée… !

Logiquement, les personnes souffrant habituellement de crise d’angoisse, d’un stress intense, voire troubles du comportement…, sont les premières victimes de ce confinement. « Ces pathologies vont s’accentuer. On s’attend en sortie de confinement, mes collègues et moi même, à un flux très important de rendez-vous ! De même, les conflits de couple seront plus nombreux, la gestion émotionnelle sera tout autre ! », explique-t-elle. D’ailleurs, cette communauté a déjà un aperçu de cette future période post-confinement… !

En effet, le retour de vécu des collègues psychologues chinois est sans ambiguïté. « Il y a une explosion des demandes de rendez-vous en urgence suite à la période de confinement en Chine. L’écart dans un couple, déjà existant concernant l’implication dans la scolarité des enfants, la participation aux tâches de la maison etc., va s’accentuer avec des conséquences importantes dans la gestion émotionnelle du couple. Ensuite, nous avons déjà beaucoup de questions sur l’après Covid-19 », commente Emeline Dautreaux.

Pour autant, cette situation singulière peut tirer positivement le tissu familial vers une nouvelle gestion de la vie quotidienne.

« une chance pour la relation parents/enfants », Emeline Dautreaux

Sur le volet de la gestion quotidienne du confinement, l’évolution est parfois « très intéressante. Là, j’assiste à des changements de comportement. Certains parents se recentrent sur les priorités. D’ailleurs, ils n’ont pas le choix. En effet, le présentiel permanent supprime tous les échappatoires, très nombreux aujourd’hui, les loisirs, le travail, les écrans etc. Il faut ralentir, appuyer sur le frein, et se recentrer sur l’essentiel. Les parents planifient, alors que d’habitude ils courent tout le temps entre le travail, les activités des enfants, l’école etc. Là, j’observe des personnes pour qui cette situation de confinement sera une chance pour la relation parents/enfants. Une patiente me disait hier qu’elle était toujours en manque de confiance pour gérer ses 3 enfants (en période classique), et pourtant elle était ravie de sa gestion durant cette période (de confinement) », poursuit-elle.

« Une nouvelle projection dès la 3ème semaine », Emeline Dautreaux

En terme de temporalité, plus les semaines de confinement passent, plus l’impact psychologique sera fort. « La première quinzaine s’inscrivait avec une stratégie impulsive dans les foyers. Il y a un objectif ! Cela va passer vite…, mais déjà durant la 3ème semaine, on commence à réfléchir différemment dans le foyer, elle pèse un peu. Il faut mettre en place un autre protocole ô quotidien, une autre stratégie pour les semaines à venir », souligne la psychologue.

Ensuite, elle met en exergue un point éclairant. « On se rend compte dans la patientèle, mais également dans la gestion de cette crise sanitaire, que certaines personnes affichant pourtant une grande aptitude à planifier, à traiter des dossiers complexes, à gérer des situations de conflits, s’écroulent face à cette crise sanitaire. Par contre, d’autres personnes se révèlent en phase de confinement demandant d’autres qualités comme une capacité à la résilience, à la flexibilité, et à l’organisation ! », conclut Emeline Dautreaux.

Comme pour un message subliminal, Emeline Dautreaux* souhaite véhiculer « une conclusion positive pour les familles à l’issue de cette phase de confinement ». Indéniablement, cette tranche de vie inédite laissera des traces dans le tissu familial, mais également dans nos rapports sociaux !

Daniel Carlier

*Emeline Dautreaux, 104 rue de Paris (06 84 75 47 61)

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