Outinord, une lutte à rebondissements et sans doute pas le dernier !
Ce mardi 13 mai 2025 à l’occasion d’un débrayage devant l’usine Outinord sur Saint-Amand-les-Eaux, le syndicat et le responsable du PSE ont fait une mise au point du dossier en cours aux salariés et des suites du combat acharné face à la Direction du Groupe mère, SKENA.

Ludovic Bouvier : « Un plan de… est toujours un licenciement massif même sous le nom de PSE ! »
L’actualité de ce fleuron de l’industrie dans la construction bâtimentaire est omniprésente. En effet, les salariés d’Outinord passent par toutes les émotions, car depuis l’annonce d’un PSE la 20 avril dernier, les rencontres s’enchaînent ! Jetons un petit regard dans le rétroviseur.
Dès 2021, le Groupe SKENA rachète l’entreprise Outinord, experte reconnue dans la fabrication de banches de coffrage (coffrets métalliques) pour la construction. En l’espèce, nous sommes dans un marché industriel de niches où vous avez seulement 3 acteurs robustes. Ensuite, l’étape suivante après le rachat s’apparente à une logique de rentabilité sur un seul site de production, en l’occurrence dans la périphérie de Poitiers.
Premier doute sur l’envie de pérenniser le site sur la cité thermale, une aide publique a été validée à hauteur d’un million d’euros en avril 2022, mais jamais réclamée par le Groupe SKENA. Donc, deux hypothèses ou vous avez après la Covid un Groupe Industriel dans une santé financière au delà de toute main tendue de l’Etat ou l’intention de vider le site du Nord de sa substance flottait déjà dans l’air… !
« La Direction reste inflexible, le PSE se poursuit, malgré ces 3 commandes », David Lienard
Suite à cette annonce d’un PSE dont l’issue est programmée la 2ème quinzaine de juillet, une réunion en Sous-Préfecture de Valenciennes a dévoilé les intentions réelles de la Direction. « En public, la Direction a déclaré ouvertement qu’une commande d’un million d’euros était destinée à la fabrication en Inde », assène Ludovic Bouvier, Secrétaire général de la CGT Métallurgie.
Oui, la réalité est que le Groupe Skema joue deux tableaux, l’unité de fabrication de production des banches sur Poitiers et sur un nouveau site monté en urgence en Inde. « Clairement, le Groupe SKENA est venue racheter le nom d’Outinord, très connue dans cette filière, et les brevets associés », souligne Patrick Dufour, adjoint à la ville de Saint-Amand-les-Eaux, et salarié retraité d’Outinord.
Sans doute après un coup de pression d’en haut, la Direction a décidé de valider la fabrication de ces banches, pour un million d’euros, sur le site de Saint-Amand-les-Eaux. « C’est un volte face par rapport au propos du Directeur huit jours plus tôt. Ensuite, nous avons reçu deux autres commandes, une pour une filiale de Vinci (450 000 euros) et une autre pour un montant de 500 000 euros », précise David Liénard. Cela représente environ un mois de charge de travail.
Néanmoins, le cadrage exposé ne bouge pas d’un cil ! « La Direction reste inflexible, le PSE se poursuit, malgré ces 3 commandes. La fin d’Outilnord reste prévue pour fin juillet ! », ajoute Ludovic Bouvier.
Une nouvelle expertise
Les dégâts pour les droits de travailleurs dans le cadre de la loi El Khomri (2016), confortée par le Président Emmanuel Macron, sont tangibles durant cette période où l’industrie française est en souffrance. En effet, la durée d’un PSE a été réduite à trois mois. Ensuite, même si une étude a été demandée légalement à l’U.C.S (UNITE DE CONTROLE SOCIAL), elle ne peut être opposable à la Direction. Le Conseil d’Etat valide cette pratique.
Toutefois, le syndicat a trouvé une parade à ce défaut de documents présentés par le Groupe SKENA. « Nous demandons une nouvelle étude (très technique) et cette fois, elle obligera cette entreprise à fournir les tenants et les aboutissants de ces choix », ajoute Ludovic Bouvier.
A ce titre, Isabelle Bosman, l’experte de l’U.C.S, indique clairement ses demandes : « Nous voulons les détails depuis 2021 concernant les 3 choix sur la table, fermeture complète, partielle sur le site de Poitiers et Saint-Amand-les-Eaux, et la solution retenue de 120 licenciements (sur 126 postes) dans le Nord. »
Une manoeuvre échappant à la loi Florange… !
Confirmant une préparation de longue date de ce dépeçage en règle de l’usine de Saint-Amand-les-Eaux, le secrétaire général régional de la CGT/Métallurgie rappelle un fait tangible : « Cette proposition échappe à la loi Florange, car il y a un maintien de 20 emplois (effectifs) sur le site. Ce sont des fonctions supports, des commerciaux et la DRH. Toutefois, un plan de… est toujours un licenciement massif même sous le nom de PSE !»
L’objectif in fine est une invalidation du PSE, mais la marge est faible. Pour autant, la mobilisation reste totale, car il ne faut rien lâcher face à cette déshumanisation industrielle flagrante.
La Porte du Hainaut vote une motion ce lundi 12 mai 2025
Bien sûr, cette situation industrielle inquiète tous les élus de proximité. A cet effet, La Porte du Hainaut à voté à l’unanimité une motion de soutien face au combat des salariés d’Outinord contre la direction.
Dans cette optique, le responsable du PSE, David Liénard était également à la rencontre des conseillers communautaires. Ce dernier rappelle le déroulé de cette démarche du Groupe SKENA. A ce titre, il interpelle le conseiller régional Jean-Michel Michalak. Ce dernier répond en soulignant que la région avait octroyé une aide publique, mais « la Direction n’a pas donné suite. Je veux souligner aussi la dignité des salariés d’Outilnord, notamment en reprenant le travail afin de réaliser la commande ». Ce mardi 13 mai, David Liénard indique qu’Aymeric Robin, président de la CAPH, et Jean-Michel Michalak, conseiller régional, ont obtenu un rendez-vous avec la Direction du Groupe SKENA.
« Je suis fièr de votre combat. Cette usine ne peut pas s’arrêter là. Il faut passer cette période difficile », commente Patrick Dufour.
Effectivement, l’activité est un peu atone compte tenu d’un ralentissement manifeste du marché de l’immobilier sauf que… : « La Direction ment, Outinord ne travaille pas uniquement pour le logement et pas seulement en France. Cette entreprise travaille à l’international et dans de multiples domaines, centrale nucléaire, centre pénitentiaire, Arche de la Défense à Paris et en ce moment sur le port d’attache des sous-marins nucléaire sur Toulon, voire sur le centre CEA de Cadarache, le plus grand centre de recherche et développement en Europe sur l’énergie nucléaire », tance Ludovic Bouvier.
La solution d’une nationalisation temporaire ne semblerait pas retenue par l’Etat, le dossier est à suivre et surtout ne rien lâcher ! Tout est encore possible même si la logique d’un actionnariat tourné vers une meilleure rentabilité tient la corde.
Daniel Carlier