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Soleil, Terre, Air, Eau, les 4 Fantastiques de l’école Jules Ferry à Aulnoy

Ouvert depuis plus de 100 jours, le Groupe Scolaire Jules Ferry a vécu son inauguration officielle à Aulnoy-lez-Valenciennes. Un temps fort communal où de nombreux invités de marque étaient présents, mais le plus connu de ses prestigieux visiteurs était « l’écologie du 21ème siècle ».

(A gauche, Laurent Depagne, et l’architecte Jean-Luc Collet à droite)

Jean-Luc Collet (architecte) : « Cette école Jules Ferry est non seulement à énergie positive, mais elle va alimenter des sites voisins »

Avant de comprendre les discours dithyrambiques, il faut balayer toutes les opportunités de cet établissement scolaire hors norme. D’abord, le Groupe scolaire Jules Ferry réunit une école maternelle et une école élémentaire. La construction, voire en l’occurrence la réhabilitation/extension, est une compétence de la commune, pas neutre dans le budget d’une ville d’environ 7 000 habitants comme Aulnoy-lez-Valenciennes. Concrètement, cette signature architecturale écologique a nécessité un budget de 9,5 millions d’euros avec des financements dont nous verrons le détail ci-après. Cette école du XXIème siècle rassemble tout ce qui peut se faire (ou presque) en terme d’énergie durable.

La Terre :

Classe avec une large surface vitrée, une surface pédagogique appréciable, mais également un plafond haut

Tout d’abord, l’effet de communication au lancement des travaux du Groupe Scolaire Jules Ferry fut le choix du matériau principal du gros oeuvre, ce fut tout simplement de la paille. Pour un élément écologique, pas de problème, mais il peut affoler certains parents anxieux, voire corps pédagogique, face à la maison d’un des trois petits cochons. « Il a fallu d’abord convaincre tout le monde sur le bien fondé des ballots de paille. Sur ce Groupe Scolaire, il y a 11 500 ballots de paille, c’est un record national », entame Laurent Depagne, le maire de la commune.

Compacté, séché, et enfermé dans un caisson de bois préfabriqué dans l’atelier d’un charpentier, un ballot de paille devient un merveilleux isolant, très résistant, avec les entourages nécessaires à une bonne tenue, il se transforme en une paroi (écologique) à part entière. C’est la Terre qui protège !!!

Chemin faisant, l’escalier de secours existant se transforme en chemin de secours parsemé de plantations, de cultures, un atelier à ciel ouvert pour l’initiation des plus petits au jardinage. C’est la Terre qui éduque !!!

Bien sûr, notre sous-sol regorge d’énergie naturelle (hors fossile). Sa première particularité est d’émettre de la chaleur. En l’espèce, le système bien connu du puits canadien s’est conjugué avec l’installation de 3 noues (fossé récupérateur d’eau de pluie). Donc, la géothermie intervient ici pour chauffer l’eau récupérée en sous-sol afin d’alimenter les radiateurs, mais également afin de rafraichir le bâtiment pendant l’été. C’est la Terre qui donne !!!

Le Soleil

Serre de l’Escalier

Plusieurs points sont abordés dans cette réalisation. Evidemment, la récupération de la chaleur émise par les rayons du soleil. Dans cette optique, une évidence s’est faite jour à travers l’installation de capteurs solaires aérothermiques dont la mission est de récupérer l’air chaud extérieur par un échangeur, et redistribué en chaleur en hiver ou en air frais en été. C’est plus classique, mais compte tenu de la taille du bâtiment, c’est le contournement Nord de la captation solaire.

Ensuite, très original, une simple tour/escalier pour accéder aux deux étages se transforme en serre… ! Très bien exposée, elle récupère l’air chaud intérieur et rebelote, il est acheminé soit en chaleur, soit en air frais. Diable, quelle est cette chaleur intérieure ? « Durant cette visite de l’école, nous dégageons de la chaleur sous forme de vapeur d’eau. Elle est récupérée par un système adapté », précise Jean-Luc Collet. En résumé, cette serre de l’escalier que des milliers de personnes vont emprunter devient une formidable source d’énergie naturelle à distiller dans toutes les pièces de l’école. C’est le Soleil qui tempère !!!!

En digression, mais pas tant que cela, dans la foule nombreuse de visiteurs, un élu lance une boutade « Laurent (Depagne), on va refacturer l’énergie produite par notre venue… ». Pas dénué de sens de l’humour cette remarque, mais pas non plus déconnant. Demain, la raréfaction de l’eau ne nécessitera-t-elle pas des milliers d’hommes et de femmes payés une misère pour produire de l’eau, issue de la vapeur d’eau, afin de satisfaire les populations des pays développés. Aujourd’hui, nous avons bien les fameuses « fermes à clic » où des hommes et des femmes, à l’autre bout de la planète, sont payés une misère indécente notamment pour « Liker » les pages de Facebook très garnies en fans bidons, le prix de la notoriété factice… ! Demain, ce sera peut-être l’énergie humaine payée une misère… !

Les enfants ne sont pas oubliés dans cette approche écologique du Soleil. En effet, un éclairage zénithal permet, grâce au positionnement des fenêtres, de récupérer un maximum de lumière naturelle du sud et par porosité complémentaire à la face Nord qui en reçoit moins. C’est le Soleil utile !!!

L’Air

Là également, le choix du vitrage fut déjà l’objet d’une belle communication à l’aube de cette réalisation. Ce sont des vitrages pariéto-dynamiques. Quesako ? Tellement simple pourtant, car l’air passant dans les fenêtres (composées de 3 épaisseurs de vitres), se réchauffe l’hiver ou se refroidit l’été. Ensuite, l’air est aspiré à l’intérieur de la pièce en hiver par une ventilation naturelle, et en été par la baie vitrée grâce à l’effet de serre du soleil. Deux petites chaudières au gaz sont présentes en complément pour l’ensemble des deux bâtiments. « Elle ne devraient servir que quelques jours par an », précise l’architecte. C’est l’Air aménagé !!!

L’Eau

C’est sans doute l’élément le plus en danger de notre avenir climatique incertain. Comme indiqué plus haut, des noues sont installées afin de lutter contre les inondations. Elles permettent également la récupération de l’eau de pluie tout en assurant une biodiversité pédagogique par le biais de petits aqueducs dont l’objectif est d’éviter l’arrosage, dans les espaces verts attenants, en faisant pénétrer l’eau directement dans la sol. C’est l’Eau bienfaitrice !!!

Hall d’accueil de l’école Jules Ferry

La fluidité

Cette signature architecturale a un autre volet très marqué. En effet, l’esprit d’ouverture est important. D’ailleurs, le hall d’accueil est singulier, conçu comme une immense surface vitrée, accueillante, lumineuse, avec une vue de l’extérieur sur deux niveaux, et de l’intérieur sur un tilleul imposant « pour lequel cet établissement s’est organisé autour, il n’était pas question de l’abattre », précise Laurent Depagne.

La déclivité des extérieurs est importante pour la mise en oeuvre de certaines techniques écologiques, mais le plus important est « que les enfants de l’école maternelle ne doivent plus sortir pour venir à la cantine », précise le maire. Une donnée très rassurante pour la directrice de l’école Jules Ferry, Nathalie Blas. Tout est réfléchi pour une fluidité des élèves maîtrisée !

« Ce ne sont que des technologies du 18ème siècle », Jean-Luc Collet

Magnifique, fort de tout cela, le commun des mortels a l’oeil pétillant, se disant que ce XXIème siècle est foisonnant d’innovations technologiques, que demain sera un temps écologique assumé…, une atmosphère verdissante s’installe sauf que l’architecte calme tout le monde. « Ce ne sont que des technologies du 18ème siècle. C’est à dire que toutes les techniques utilisées dans ce bâtiment scolaire existaient avant le pétrole. Pour autant, aujourd’hui, vous avez un bâtiment actif. Cette école Jules Ferry est non seulement à énergie positive, mais elle va alimenter des sites voisins », annonce Jean-Luc Collet.

Là, l’assistance se tait, et chaque élu se dit tout bas. Mais pourquoi dans mon école, mon collège, mes bâtiments publics, je n’ai pas utilisé ces techniques écologiques connues ? En effet, ici et là certaines surfaces vitrées, comme pour le Lycée de l’Escaut à Valenciennes et bien d’autres dans le Valenciennois, sont proches de la cabine à UV dès une forte chaleur. « Il peut faire 50 à 60° dans les salles en façade… », précise Jean-Marcel Grandame, ancien proviseur du Lycée de l’Escaut, et présent comme vice-président de Valenciennes Métropole, partenaire très impliqué dans ce projet.

« A cette époque, ces techniques n’étaient pas assez démonstratives ! », répond Jean-Luc Collet. On peut ajouter à cette donnée un fait budgétaire. « Cette réalisation a coûté moins 15 % qu’une construction avec des techniques plus classiques », précise l’architecte durant la visite. Certes connues, mais encore maîtrisées par tous, et la rareté de la compétence fait monter le prix. D’ailleurs, Jean-Luc Collet explique qu’une formation pour l’utilisation des ballots de paille a été réalisée très récemment. Nous reviendrons ci-après sur le coût, c’est l’indicateur clé pour une vulgarisation à grande échelle de ces pratiques.

Une réalisation suivie par les radars écologiques

Pas étonnant que l’ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie) fut, dès la première heure, un soutien financier de cette réhabilitation/extension. « Nous allons suivre pendant deux ans les résultats de ce Groupe Scolaire Jules Ferry qui a répondu à un appel à projet national. C’est une combinaison de technologies innovantes, une matière biosourcée, la paille, la géothermie de surface, etc. Sachant que la France importe 98% de son gaz et pétrole, plus 100 % de son charbon, il est important de trouver des savoir-faire sur ces sujets », explique Bruno Frimat, Directeur adjoint de l’ADEME.

Cette confiance dans l’intérêt écologique s’est vue récompensée. « Nous avons obtenu le prix Euro-Région pour le meilleur bâtiment biosourcé », précise Laurent Depagne.

Point de polémique sur la sémantique, mais vous noterez la différence de vocabulaire. L’architecte évoque des pratiques connues d’antan, certes améliorées, mais pas utilisées, tandis que l’ADEME parle d’innovations. On met le doigt sur les fondamentaux d’une découverte, d’une invention. Elle existe dès qu’elle se traduit concrètement à travers l’utilisation par le grand public ? Où existe-t-elle avant dès son invention sans, comme souvent, un débouché opérationnel ? Là réside le volant de développement de ces technologies au service d’un bâtiment écologique.

Sur ce point, le maire d’Aulnoy-lez-Valenciennes lâche les mots clés pour un premier magistrat, telle une extinction automatique à eau dans un bâtiment public, les mots… investissement/fonctionnement. « Tous les maires le savent, le problème n’est pas l’investissement, mais le combat de tous les instants sur le budget de fonctionnement », explique Laurent Depagne. Ici, pour le Groupe Scolaire Jules Ferry « nous n’avons pas de coût de fonctionnement associé à ces installations », précise l’édile de la commune. « Le coût de la maintenance est égal à zéro », précise sans ambiguïté Jean-Luc Collet. Cela demande incontestablement une vérification poste par poste, mais cette affirmation résonne encore dans toutes les oreilles des visiteurs.

C’est même peu de la dire, le Sous-Préfet de Valenciennes, Christian Rock, partenaire financier important au titre de l’Etat, déclare. « C’est un geste architectural de très haute qualité. A l’heure où l’Etat (et ses compétences décentralisées) est dans une réflexion afin de moderniser ses sites scolaires, il n’est pas impossible que nous rencontrions Jean-Luc Collet ». Peu avant, le président du Conseil départemental du Nord, partenaire financier plus modeste, Jean-René Lecerf, précise… « nous avons 202 collèges publics dans le département du Nord. Je pourrais bien faire appel à Jean-Luc Collet afin de réfléchir sur ces aménagements. En tout cas, à Aulnoy-lez-Valenciennes, vous avez lancé une armée de colibri (Référence à l’histoire du colibri et de sa goutte d’eau) ».

Laurent Degallaix, présent durant la première partie de la visite protocolaire, était accompagné de Jean-Marcel Grandame pour qui l’école est plus qu’un dossier lambda. Ancien homme fort du collège de la Chasse Royale, puis du Lycée de l’Escaut, il est aujourd’hui vice-président au sein Valenciennes Métropole en charge de l’urbanisation : « Grâce au fonds de soutien, la CAVM a mis plus d’un million d’euros dans ce projet. Nous devons essaimer sur ce territoire ces pratiques écologiques ».

Enfin, malgré une chanson d’une enseignante « Qui a eu cette idée folle… de refaire l’école », soulignant que le défi était beau, mais compliqué à vivre, le maire de la commune a tenu à remercier vivement tous les partenaires et l’équipe pédagogique de l’école Jules Ferry : « Sans qui rien n’est possible. Nous avons eu également un soutien important de l’Europe (Feder) à l’heure où on discute de son utilité. Nous avons osé ce projet ! ».

Enfin, la phrase du jour pour l’inspection académique bluffée du résultat offert aux 13 classes et à ses heureux occupants. « Plus tard, vous pourrez dire j’y étais à cette inauguration de l’école Jules Ferry. Nous passons d’une école en chantier à une école enchantée ! ». Voilà le récit imparfait d’une histoire verte d’un – songe d’une nuit d’été – … écologique !

Daniel Carlier

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