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Notre-Dame du Saint-Cordon, une restauration comme un chemin de croix !

Propriété de la ville de Valenciennes, la Basilique Notre-Dame du Saint-Cordon a subi les outrages du temps depuis son édification au XIXème siècle. Pour autant, sa qualité patrimoniale comme son destin cultuel fédèrent de nombreux valenciennois comme les membres de l’association du « Comité de Sauvegarde du Patrimoine Valenciennois » comme ceux de « l’Association pour la restauration de la Basilique », rencontre avec des membres passionnés de ces structures pour un échange éclairant !

(De gauche à droite, René Delcourt, Alexandre Bonduelle, Alain Cybertowicz, et Jean Poncet avec en toile de fond Notre-Dame du Saint-Cordon)

Afin de répondre à une publication du 31 octobre 2019 sur ce quotidien de presse numérique où au détour d’un article sur l’église Saint-Géry, un paragraphe sur l’intérêt discutable de la poursuite des travaux très dispendieux en faveur de la restauration de la Basilique Notre-Dame du Saint-Cordon a fait réagir le tissu associatif avec leur liberté d’expression, et la mise au point est très argumentée !

« Notre-Dame- du Saint-Cordon devient Basilique en 1922… », Jean Poncet

Un coup de rétroviseur dans notre mémoire collective est nécéssaire afin de comprendre toute la dimension de ce bâtiment. Cet édifice religieux Notre-Dame du Saint-Cordon répond d’abord à un besoin des fidèles du diocèse de Cambrai, et plus loin encore. En effet, ces derniers viennent en nombre croissant rendre hommage à Notre-Dame du Saint-Cordon, protectrice de Valenciennes depuis 1807. Il apparaît de facto nécessaire de trouver un lieu pour matérialiser cette reconnaissance des catholiques du Valenciennois, là ou la statue de Notre-Dame du Saint-Cordon trouvera un écrin à la mesure de la dévotion de ses fidèles.

Chemin faisant, le choix de l’emplacement s’est arrêté là où nous le connaissons aujourd’hui. De style gothique à la suite d’un concours local d’architectes remporté par Alexandre de Grigny en 1850, les travaux s’étalent entre 1852 et 1859.

Le sel de cette construction est que le financement, déjà à l’époque, est compliqué malgré les fonds ecclésiastiques, les dons… Les autorités religieuses décident donc de céder pour le franc symbolique en 1855, et les dettes associées, à la ville de Valenciennes. Ainsi, la commune reprend la main sur le chantier de Notre-Dame du Saint-Cordon et son édification la même année. Ce bâtiment est donc communal bien avant la loi de 1905 marquant au fer rouge dans notre histoire la séparation de l’Eglise et de l’Etat. Ceci est tout sauf un détail de l’histoire locale.

Les travaux s’achèvent en 1859 avec des dimensions rappelant Notre-Dame La Grande, ancienne église tombée sous la Révolution, 68,50 mètres de longueur, 26,80 mètres de hauteur (plus d’infos sur https://basiliquesaintcordon.valenciennes.fr/).

Le moment temps attendu de la consécration de Notre-Dame du Saint-Cordon intervient le 04 mai 1864, puis son inauguration solennelle le 05 mai. On notera que sur la même ligne que la loi de 1905, l’affectataire exclusif et perpétuel est bien l’église catholique. Ce n’est pas une exception en France où l’idée du croisement entre le civil et le religieux existait depuis le Moyen-âge. En effet, à cette époque les abbayes laïques apparurent dans le Béarn principalement. Sur cette contrée de France, le caractère systématique de l’abbé laïque intrigue encore les historiens à travers bien des ouvrages et un patrimoine conséquent. Déjà à cette époque, on a osé agglomérer deux noms antinomiques, laïque et religieux, c’est toute l’histoire de Notre-Dame-du Saint-Cordon dans le Valenciennois.

Consacré en 1864, cet édifice religieux passe une étape décisive dans sa vie catholique. « En 1922, Notre-Dame du Saint-Cordon devient « Basilique mineure ». En effet, vous pouvez effectuer dans cet édifice religieux un pèlerinage, à travers la ronde, en hommage à Notre-Dame du Saint-Cordon », précise Jean Poncet, membre de l’association pour la restauration de la Basilique. « Concrètement, cette Basilique ne peut être désacralisée que par le Pape », précise Jean Poncet. On rappelle que chaque année en France, des édifices religieux sont désacralisés par le Diocèse en charge, et de fait réaffecter par le propriétaire (la commune depuis 1905) compte tenu des immenses difficultés d’entretien d’un bâtiment municipal aussi ancien.

« Une fatalité à détruire le patrimoine à Valenciennes », Alain Cybertowicz

Pour autant, l’histoire patrimoniale locale inquiète à travers le temps. « Il y a une fatalité à détruire le patrimoine à Valenciennes, Notre-Dame la Grande à la Révolution, le Théâtre de Valenciennes (Place D’Armes), le Beffroi de Valenciennes (Place d’Armes), les Remparts et sa citadelle Vauban. Nous devons sauver ce qui reste du Patrimoine sur la ville de Valenciennes », précise  Alain Cybertowicz, le Président de l’association du Comité de sauvegarde du patrimoine.

L’écluse des repenties demeure le seul vestige des remparts d’antan, il apparaît donc impérieux pour ces associations de sauver Notre-Dame du Saint-Cordon. D’ailleurs, cette procession annuelle au mois de septembre rassemble depuis plus de mille ans « cette unité commune, le profane et le religieux, le pauvre et le riche. Dès le début, le civil et l’ordre religieux furent associés. Doit-on regarder uniquement cette restauration sur son aspect financier ? », s’interroge Jérome Guilleminot, ex président du Comité de sauvegarde du patrimoine.

Sur ce point, René Delcourt conforte de propos « il faut prendre en considération l’aspect sentimental. Les Valenciennois sont extrêmement attachés à leur basilique, elle est très populaire. Jean-Louis Borloo disait – à Valenciennes, il y a le VAFC et le Saint-Cordon (la Basilique et la procession annuelle associée) avec un attachement viscéral aux deux – ».

« Nous revenons après travaux à la situation d’avant 2007 », Alexis Bonduelle

Le moins que l’on puise dire est que ce dossier est tentaculaire, juridique, extraordinairement technique, et complexe. En premier lieu, il faut souligner que tout à commencer sous le mandat de Dominique Riquet. « Les seules évaluations chiffrées, publiques et officielles en 2003, ont estimé à environ 13 millions d’euros la restauration de la Basilique Notre-Dame du Saint-Cordon », commente Jean Poncet.

Fort d’une subvention de l’Etat de 3 millions d’euros obtenu par Jean-Louis Borloo (déjà ministre), d’un million d’euros de la région Nord-Pas de Calais, plus un million d’euros par la ville de Valenciennes, les travaux démarrent « voilà comment débute ce chantier de la restauration de la Basilique », poursuit Jean Poncet.

Sauf que l’histoire de la conduite de ce chantier est désastreuse. Dès les premiers mois, l’opération tourne court avec des affaissements, etc. C’est pourquoi, en sus de l’usure du temps, la ville de Valenciennes a donné pour mission à l’architecte Bisman le confortement de la Basilique Notre-Dame du Saint-Cordon.« En clair, nous revenons (aujourd’hui) après travaux à la situation d’avant 2007. C’est fou ! », tance Alexis Bonduelle, membre de l’association pour la restauration de la Basilique « laïque et indépendante », précise-t-il fermement.

Un orgue unique en France

Néanmoins, la ville de Valenciennes a plusieurs fois montré son engagement vers l’avant en faveur de la poursuite de ce chantier au long cours. Les vitraux et chemin de la 1ère travée achevés, le clocher préservé, l’orgue restauré « unique en France, car l’organiste peut piloter les deux orgues, celui du coeur et de tribune, classés aux monuments historiques. Le journal Valenciennes Infos a relaté dernièrement la remise en place de ces derniers ». Il n’en demeure pas moins que le reste à charge des travaux intérieurs et plus encore extérieurs est monumental.

« Il faut phaser ces travaux sur 20 ans », Alexis Bonduelle

La suite de ce chantier amène à s’intéresser à la nébulosité du dossier financier. Expertise, contre expertise, depuis plus de dix ans, procédure au long cours où la ville de Valenciennes « a gagné en première instance, mais nous n’avons pas les chiffres exacts sur le montant récupéré au titre des Dommages et Intérêts par la ville de Valenciennes. C’est l’opacité totale sur les fonds destinés, voire à disposition pour cette restauration », explique Jean Poncet. Qui connaît exactement les montants investis, depuis le 1er euro, dans les études, les expertises…, et les travaux inhérent à la restauration de la Basilique Notre-Dame du Saint-Cordon. Ce fait interpelle comme si ce volet financier municipal « Notre-Dame du Saint-Cordon » était cloîtré dans une bibliothèque inaccessible, un peu dans l’ambiance du film « Au nom de la Rose ». Même les fonds secrets de l’Elysée sont devenus publics avec le temps, mais pas l’argent des contribuables valenciennois investi par la ville dans une restauration d’un bâtiment communal sur plusieurs mandats, « c’est croquignolesque« , dirait le Président de la République  !!!

« On agite toujours l’épouvantail du coût global (estimé) de cette restauration. Certes, l’investissement est lourd, mais l’aspect patrimonial de cette Basilique Notre-Dame du Saint-Cordon est indéniable. Il faut phaser ces travaux sur 20 ans, expliquer comment, etc. », poursuit Alexis Bonduelle.

Ces divers propos sont d’une simplicité presque biblique. Ces associations savent ô combien ce chantier s’inscrit sur le temps long, qu’il y a mille et un dossier d’urgence avant. C’est pourquoi, l’inscription d’un budget officiel lissé dans le temps permettrait aux contribuables, et pas seulement à la communauté du Diocèse de Cambrai, d’attendre cette restauration dans les années à venir.

A un moment donné, vous ne pouvez pas porter aux nues, chaque année, le mélange du civil et de l’église à l’occasion du fameux Tour du Saint-Cordon où les élu(e)s portent fièrement Notre-Dame du Saint-Cordon afin de célébrer ce mélange, très sain, du laïque et du religieux ; et de l’autre, ne pas révéler dans le budget municipal, donc les impôts contribuables au final, les montants alloués annuellement à ce petit bout d’éternité. Chaque Valenciennois est en capacité de comprendre un décalage, une urgence sanitaire, repoussant telle ou telle partie du chantier, c’est intelligible. Les associations demandent simplement un minimum de visibilité.

Sans aucun doute, l’autorité du premier magistrat « car tout dépend d’un seul homme », commente Alexis Bonduelle (nous l’avons constaté pour le Mont de Piété), expliquera qu’à l’instar de toutes les communes françaises, la ville de Valenciennes n’a plus aucune visibilité sur les dotations de l’Etat, etc. Tout s’explique, tout se traduit, la forme est fondamentale pour l’acceptabilité de ce chantier par tous les administrés.

Bien évidemment, chaque électrice, chaque électeur, n’a pas mécaniquement la même approche face aux sommes pharaoniques engagées sur un territoire socialement en souffrance, mais la connaissance d’une trajectoire financière sur cette restauration permettrait de comprendre les demandes d’autres citoyens, de l’accepter, de ne pas juger sans partager la même opinion, cela s’appelle la démocratie. A ce titre, « nous attendons une grande réunion sur la restauration de la Basilique Notre-Dame du Saint-Cordon avec tous les acteurs concernés, les associations, etc. ! Elle était programmée en novembre 2020. Evidemment, elle est décalée pour raison sanitaire. La Basilique Notre-Dame du Saint-Cordon est prête pour sa restauration », rappelle Jean Poncet.

« Les dons sont plus nombreux », Alain Cybertowicz

Et de manière plus pragmatique encore, il ne faut pas négliger le volet du don des particuliers ou des entreprises, l’incendie de Notre-Dame de Paris est éclairant à cet effet. « Depuis que les Valenciennois voient concrètement des travaux sur notre site au 94 rue de Paris Prolongé, les dons sont plus nombreux (article https://www.va-infos.fr/2017/09/14/patrimoine-dotation-de-15-000e-credit-agricole-94-rue-de-paris/) », commente Alain Cybertowicz.

La morale de cette histoire commune aux Valenciennois est qu’une communication municipale claire sur le sujet de la restauration de la Basilique Notre-Dame du Saint-Cordon permettrait (peut-être) au final de réduire la part d’argent public grâce aux dons privés « à hauteur de 100 000 euros à l’occasion de la 1ère collecte », rappelle Jean Poncet. Cocasse, quand le denier du culte rencontre l’impôt éternel du contribuable…, tout devient possible !!!

Daniel Carlier

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