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Recruter un sénior, c’est l’avenir incontournable de nos entreprises publiques et privées

Que dire sur le mur d’âge d’accès à l’emploi, il se fissure, il se déconstruit, il perd de sa substance, voire de son sens tel le Mur de Berlin tombé en 1989. Pour arriver à bonne fin, des initiatives s’organisent sur ce territoire et partout en France afin de bousculer cette coutume. Sur le Valenciennois, une nouvelle opération « entreprise éphémère » portée par l’association « les entreprises organisent » est opérationnelle sur la commune de Prouvy. En effet, depuis le 02 septembre 2025, 35 séniors sont engagés dans la conquête d’un emploi, bien décidés à démontrer la pertinence d’un recrutement d’une personne de plus de 50 ans

Stéphane Costaglioli : « Il faut changer le regard sur les séniors des deux côtés, employeur comme demandeur d’emploi »

Ce mardi 09 septembre, la présence du Sous-Préfet de Valenciennes, Stéphane Costaglioli, malgré une actualité très chargée souligne la prééminence du sujet. « Je souhaitais être là. L’emploi des séniors de plus de 50 ans est un enjeu économique et social. Je remercie la maire de Prouvy pour mettre à disposition les outils de la commune. »  Evidemment, quelques chiffres sont importants pour planter le débat : « 1/3 de la population active a plus de 50 ans. Le taux d’emploi des séniors est de 58% au niveau national, mais de 47% dans les Hauts de France contre 64% dans l’Union européenne. » Enfin, si le regard de l’employeur, parfois condescendant sur la demande hardie… d’un sénior « que voulez-vous que je vous propose à votre âge », témoigne un participant suite à un jobdating, il est indispensable de modifier l’approche de ce retour à l’emploi : «  Il faut changer le regard sur les séniors des deux côtés, employeur comme demandeur d’emploi. »

Compétent et pertinent, le senior peut résoudre les problèmes de recrutement dans toutes les filières

François Fermandez, Stéphane Costaglioli et Isabelle Choain

Si les chiffres nationaux et régionaux sont éloquents, il serait intéressant de connaître celui de cet arrondissement du Valenciennois. En effet, son histoire industrieuse depuis plusieurs siècles a construit un contrat de confiance indéterminé entre l’individu et l’entreprise, l’emploi dans la même société tout au long de sa vie. La rupture de cette assurance sociale a transformé cette perte de travail par cette culpabilité dans l’inconscient collectif des demandeurs d’emplois, un sentiment ancré de responsabilité, de culpabilité, d’inutilité très marquée ! Un peu comme la femme battue qui se culpabilise, le senior sans emploi se flagelle en pensant que le problème vient évidemment de lui !

Cette époque est à balayer d’un revers de main, il faut casser cette dynamique et cette initiative de l’entreprise éphémère renverse un logiciel obsolète. Attention, nous ne sommes pas dans les bonnes résolutions de début d’année. Non, embaucher massivement les séniors dans la sphère publique comme privée devient au fil des mois inéluctable ! Pourquoi ?  Tout simplement, compte tenu que le marché du recrutement est très compliqué, les séniors deviennent de fait un gisement d’employabilité immédiat. Ensuite, la perte de compétences après 50 ans n’est plus qu’une légende urbaine, elle ne repose sur rien. « Nous étions sur des croyances où le sénior serait moins dynamique, mois compétent… ! Aujourd’hui, le senior peut justifier une compétence, une expérience, des qualifications et surtout un savoir-être très recherché par l’employeur », commente François Fernandez, le Directeur de France Travail Valenciennes.

Qui plus est, la baisse démographique annoncée dans ce département du Nord impose, pour les employeurs publics comme privés, à regarder ailleurs… et très vite !

Travailler « le marché caché » de l’emploi

L’édile de la commune de Prouvy, Isabelle Choain, soutient cette démarche engagée : « Vous êtes ici chez vous, car une mairie doit vivre. Ensuite, très engagée sur le féminisme, j’ajoute que la recherche d’emploi pour une femme est encore plus difficile. Même si vous avez un manque de confiance, vous n’êtes pas âgés ! »

Christine Beaupel

Concrètement, ce collectif baptisé par les 35 participant(e)s, la « Phénix Team », reçoit les chef(fe)s d’entreprises chaque jour afin que ces derniers proposent des offres d’emplois. En face, des compétences sont affichées dans une très grande diversité. « Nous avons des compétences métiers très diverses parmi ces 35 participant(e)s (dont les 3/4 sont très éloignés de l’emploi) », explique Christine Beaupel, la coach du dispositif « Entreprises Ephémères ».

Dans cette optique, l’originalité de cette démarche solidaire, déjà testée en mai 2024 au sein des « Ateliers numériques » sur Valenciennes https://www.va-infos.fr/2024/03/20/le-talent-ephemere-a-duree-illimitee-en-7-semaines/ avec un résultat probant où 7 personnes sur 10 ont (re)trouvé un travail, doit aussi casser certains codes. 

En effet, outre le fait de recevoir les entrepreneur(e)s, il faut chercher ailleurs que sur l’épiderme social. « Il existe un marché caché de l’emploi, car toutes les offres de l’emploi ne sont pas publiées. C’est pourquoi, nous devons échanger en direct avec les chefs d’entreprises », ajoute François Fernandez. 

Des témoignages éloquents !

Deux participants ont témoigné sur leur engagement. Venue d’Amérique du Sud il y a 27 ans, elle a une compétence de pâtissière. « Dans un pays (et un territoire) qui m’a accueilli les bras ouverts, je remercie les coachs pour leur énorme patience afin de nous remettre sur les rails de l’emploi. L’âge n’est qu’un nombre ! » Pour un autre sénior engagé, il raconte avec émotion son licenciement après 38 ans comme manager. Pour autant, malgré les coups, parfois l’abattement, il lance avec courage « je ne me vois pas rester sans emploi. » 

Pour conforter la pertinence de cette entreprise éphémère, accompagnée par la CCI Grand Hainaut avec Nathalie Delelis dans le lien entre les entreprises et ce dispositif, une employeure vient témoigner. Directrice d’un EPHAD sur Condé-sur-l’Escaut, elle a recruté une participante au dispositif « Entreprise Ephémère » de l’année dernière dans le Valenciennois. « Elle m’a donné une chance même si je n’avais que le BAFA après 23 passés dans une pâtisserie/boulangerie. Ayez confiance ! J’ai pu me former à mon nouveau métier. Vous êtes très bien entourés avec des coachs formidables ! »

A chaque fois qu’un participant trouve un travail, la tradition veut qu’une petite cloche sonne comme pour mettre un son, comme un vocal très moderne, sur un nouvel avenir ! Alors que la cloche sonne encore et encore pour la « Phénix Team » pendant ces semaines constructives sur Prouvy.

Daniel Carlier

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