Valenciennois

Pierre Richard pour une invitation au voyage nocturne.

Les mardi 7 et mercredi 8 mars, notre Pierre Richard national, sera de retour dans sa ville natale pour Petit éloge de la nuit, sur un très joli texte d’Ingrid Astier, mise en scène Gérard Garutti. Pierre Richard nous a accordé une interview pour parler de la poésie du spectacle, de ce monde fantastique qui s’ouvre, peuplé de démons et de merveilles, ce voyage à l’orée de la nuit. Quelques minutes où l’on a causé de Madeleines, de Valenciennes, de la nuit et d’écologie…Interview.

(Crédit photo  Cosimo Mirco Maglioca)

Petit éloge de la nuit : un regard amusé où pétille la tendresse, où nous charme la vie. Comme celui de Pierre Richard !

Soit disant timide mais qui se soigne, né le 16 août 1934, Pierre Richard Defays, règne sur la comédie française. Figure incontournable et emblématique du cinéma français, tout, ou presque, a déjà été dit sur Pierre Richard. Bien sûr, on a tous siffloté l’air, que l’on a encore si facilement en tête, du grand blond composé par Vladimir Cosma. Dans sa valise, plus de 70 films, on se souvient de Le Distrait où il interprète à merveille le rôle d’un permanent gaffeur ou encore Le Jouet, Le Grand blond et La Chèvre, Les compères et Les fugitifs. La liste, pour notre plus grand plaisir, est bien longue …., mais Pierre Richard, c’est aussi Je sais rien mais je dirai tout, son autobiographie où il dresse un portrait peu flatteur de son père, avec qui les rapports n’ont jamais été simples « aucun jouet, si beau soit-il, ne peut remplacer le regard affectueux d’un père. Je suis bien placé pour le savoir, j’ai écrit des lettres d’amour au mien, je n’ai jamais eu de réponse. Aujourd’hui encore, j’attends toujours qu’elles tombent du ciel. »

On a gardé en tête cette cérémonie des Césars en 2006 où Pierre Richard a reçu un César d’Honneur en smoking et baskets blanches. Juste parfait. Juste lui. Il en rit encore, tout étonné de l’effet « oui parce que, je voulais évidemment remercier, mais c’est une marque de fabrique chez moi, je suis toujours resté un peu marginal… » . Un peu marginal, un peu lunaire, un peu gaffeur, un peu doux rêveur, mais ça lui va tellement bien. Son ami, Gérard Depardieu dit de lui « Pierre c’est un joli petit nuage qui passe dans un ciel d’été ». Le Valenciennois d’origine aime à revenir dans l’ Athènes du Nord, un goût de Madeleines de Proust, « je reviens souvent…  à chaque fois, c’est un réel plaisir. Je parcours les rues, je me souviens, mes amis, mes copains, ma famille…bon je ne retrouve pas toujours les rues, car Valenciennes a changé. »

Crédit photo @Pauline Maillet
Crédit photo @Pauline Maillet

Petit éloge de la nuit où les charmes nocturnes, un magnifique hommage aux puissances de la nuit.

Ne vous méprenez pas, Petit éloge de la nuit, « ce n est pas une lecture d’un texte assis sur une chaise. C’est un show poétique ! » Les textes, Pierre Richard, il les joue. «  je les danse. Je les ressens. » Ce qui ravit Gérald Darutti, le metteur en scène shakespearien. «  Je ne m’attendais pas à cela, je prends un plaisir fou . Gérald Darutti me dit souvent «  vas-y propose moi », il me laisse carte blanche », confie l’épicurien. « Il y a de la magie dans ce spectacle, le texte est superbe, les images sont splendides.  Nous avons aussi tourné chez moi, dans le midi, la nuit. Cela part dans tous les sens – comme les nuits – Il y a un grand écran, une danseuse de l’opéra, magnifique…», glisse t-il. Il faut dire que Marie-Agnès Gillot est l’actuelle étoile du ballet de l’Opéra de Paris, corps céleste, émouvant et mouvant, elle danse sur une musique de Laurent Petitgand, auteur compositeur, s’il vous plaît, de la musique des Ailes du Désir de Wim Wenders, rien que ça, ça nous met l’eau à la bouche.

« Il a fallu faire taire le bruit du monde, laisser les mots s’ouvrir, telle la fleur du Datura le soir, pour répandre leurs parfums. Ce spectacle est le fruit de notes vagabondes, de nuits inspirées, de lectures ou de dialogues croisés. Nuit de veille ou d’insomnie, nuit d’amour ou nuit de l’esprit… »

Petit éloge de la nuit est l’aventure d’une rêverie au sourire de lune. Une échappée belle aux teintes de Magritte, une ode à la beauté nocturne. Une main généreuse tendue à tout ce qui en nous déraisonne le jour et résonne la nuit, une invitation au royaume du for intérieur et des constellations infinies. Une parole intime traversée de polyphonie joyeuse, une délicatesse sincère épanouie en fraternité radieuse. Une innocence désarmante scintillant d’humanité savoureuse, un regard amusé où pétille la tendresse, où nous charme la vie. 1 h 30 de spectacle, une ode à la beauté nocturne, « je regarde en moi cette vie souterraine qui s’agite, en silence, et projette sa fascination. La nuit vit à un rythme singulier : elle a sa propre horloge. Un temps arrêté, suspendu ou étiré. Elle ouvre le coffre-fort de la sensation. », où Pierre Richard parle « des nuits, des nuits d’horreur, des nuits de veille, des nuits d’amour, des nuits de fête, des nuits de Champagne, des nuits de travail.. .on vit des quantités de nuits ». On lui souffle « des nuits de vin… », le viticulteur répond avec le sourire dans la voix « oh oui …»

Le regard dénonciateur de Pierre Richard sur la planète.

Le comique burlesque et poétique a réalisé et interprété, également, il y a quelques années des films dénonciateurs, un terme qui a toute son importance auquel il ajoute « engagé écologiquement ». Il nous en parle «  Le distrait, tourne en dérision le monde de la publicité, et la pollution de la publicité, on ne peut pas dire que cela ait changé, Les malheurs d’Alfred se moque des jeux télévisés, en fait, cela non plus n’a pas beaucoup changé…., et le troisième Je ne sais rien mais je dirai tout dénonce les ventes d’armes, et de ce coté là.. . on ne peut pas dire que le marché des armes se soit arrêté! »

Alors Pierre Richard, aujourd’hui, dans la société, sur quoi tourneriez vous un film ? Pour dénoncer quoi ? Qu’ est ce qui vous révolte ? «Ma préoccupation est le sort de la planète, écologiquement parlant. Le climat se détracte, les mers sont polluées, le viticulteur que je suis le voit dans la terre aussi…la pollution ! C’est très inquiétant. Je pense à mes  enfants, à mes petits enfants. Le diesel pollue, on le sait et on le dit depuis des années, mais on continue d’en vendre et d’en fabriquer surtout… », confie celui que l’on connaît aussi comme grand défenseur des Indiens d’Amazonie et de leur forêt. Et là, on est en droit, de se demander si dans quelques années, on dira comme Pierre Richard « et là, ça n’a pas beaucoup changé. »

Une chose est sûre, le grand blond a aujourd’hui blanchi mais il a gardé cette folle lueur dans le regard et son étoile qui le guide en toute circonstance, le rêve. Nous, on ne pourra pas résister, on jettera, quand même, on ne sait jamais, un petit coup d’œil à ses chaussures…

 

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