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La ville de Raismes se dirige vers une procédure pénale !

Dans la procédure en référé auprès du Tribunal administratif opposant la ville de Raismes et l’association « Mine de Savoirs », liée à l’ouverture d’une école privée hors contrat, la commune n’a pas obtenu gain de cause. Pour autant, Aymeric Robin perçoit à travers ce jugement un nouvel horizon juridique.

Pas d’urgence absolue…. !

Jeudi 28 septembre 2017, le Tribunal administratif de Lille a rendu son jugement dans la procédure opposant la ville de Raismes et l’association Mine de Savoirs. Cette dernière est responsable de l’ouverture d’une école privée hors contrat sans l’autorisation de la commune, mais l’accord du Rectorat de Lille.

Le jugement du TA de Lille rejette le référé suspensif de la commune de Raismes invoquant «  une absence d’urgence à suspendre la décision ». Pour autant, ce rendu n’est pas de nature à abattre le premier magistrat « je n’arrive pas à être déçu, cela clarifie les choses. Cette décision démontre que les outils législatifs sont inopérants face à l’ouverture d’une école privée hors contrat sur votre commune. Il est plus difficile d’ouvrir un restaurant ou un café qu’un lieu d’enseignement ! L’article régissant cette ouverture, 441-4, est issu du Code de l’Education de 1919… », assène Aymeric Robin.

Il trouve la force de poursuivre ce combat dans le libellé du jugement car «il montre le bien fondé de notre démarche. L’interdiction d’une ouverture est liée au cumul d’une levée d’opposition de la commune et du Rectorat. Cela permet une liberté d’interprétation très large », poursuit-il. En effet, le 27 juin 2017, malgré le maintien d’un double refus de la commune de Raismes, le Rectorat a levé son opposition et de facto l’association Mine de Savoirs a interprété cet acte administratif comme une autorisation d’ouverture en septembre 2017.

Pour Aymeric Robin, deux éléments factuels découlent de cette décision peu surprenante. « Il faut renverser la charge de la preuve pour l’ouverture d’une école privée hors contrat comme le préconisait Najat Vallaud-Belkacem (ancienne Ministre de l’Education nationale). Ensuite, ce jugement mentionne clairement notre bon droit afin de poursuivre sur le volet délictuel l’association Mine de Savoirs devant le Tribunal correctionnel de Valenciennes. Je compte rencontrer dans les meilleurs délais le Procureur de la République », indique le maire.

Si cette action est conduite par la commune, il existe deux cas de figure, soit le Procureur de la République s’autosaisit et la ville de Raismes se constitue partie civile, soit la commune de Raismes dépose une plainte contre l’association Mine de Savoirs. Pour la précision, l’Etat n’est pas attaquable pénalement, seul le Tribunal administratif pourrait le mettre en cause sur le fond, « dans quelques mois, voire quelques années », souligne le maire. Par contre, une procédure pénale à l’encontre de l’association Mine de Savoirs devant le TGI de Valenciennes serait nettement plus rapide. Cette action en justice pourrait déboucher sur la fermeture de cette école privée hors contrat si la municipalité obtenait gain de cause.

Aymeric Robin : « Ce n’est pas un combat personnel, c’est un engagement républicain, et je réfute tout amalgame »

Aucun doute, cette situation n’est pas spécifique au Valenciennois. Une affaire similaire est d’ailleurs intervenue en septembre 2015 sur la commune de Caen. Le TA a validé l’opposition de la commune « s’agissant d’une ouverture imprécise et improvisée »… « pas dans le strict respect des conditions d’une ouverture d’une école sur la commune ».

Toutefois, le maire de la commune tient fermement à préciser l’action municipale : « Ce n’est pas un combat personnel, c’est un engagement républicain, et je réfute tout amalgame. Par contre, imaginons un incident, un incendie, une épidémie, qui serait le responsable ? », assène le maire…. voire une barrière qui cède de manière improbable !! A ce titre, la mairie de Raismes a pointé du doigt « une absence de contrôle approfondi »… « un rapport de l’Education nationale lacunaire ».

Le Rectorat a fait savoir à la municipalité qui lui serait plus facile d’intervenir après l’ouverture. Dans cette optique, une inspection devrait être diligentée au sein de cette école privée hors contrat.

Pour autant, devant le TA, le représentant du recteur de l’Académie de Lille a rappelé que «  la liberté d’enseignement est un principe à valeur constitutionnelle »… « que le contrôle des bonnes moeurs se rapporte uniquement au déclarant ; que la condition tenant à l’hygiène ne se confond pas avec les motifs de sécurité ».  Face à cette affirmation, le maire souligne que le 24 juillet 2017, le rectorat a eu connaissance d’une information concernant une enquête pénale ouverte à l’encontre de membres de l’association Mine de Savoirs… sans effet sur la décision du Recteur visiblement !

Cette dichotomie sur les points de contrôle relatifs à l’ouverture d’une école privée hors contrat a été évoquée dans la précédente publication ci-jointe : https://www.va-infos.fr/2017/09/07/vide-ou-impasse-juridique-face-a-une-ecole-privee-hors-contrat/

Face à cette argumentation, le premier magistrat justifie son action républicaine. Certes, la loi de 1901 sur les associations, celle de 1905 sur la séparation de l’Eglise et de l’Etat, sont quasi immuables, mais en l’occurence le Code de l’Education nationale date de 1919. L’Education de nos enfants n’a-t-elle pas évolué avec les décennies. Un siècle plus tard, la forme et le fond de l’enseignement pédagogique ne vaudraient-ils pas un nouveau regard éclairé du législateur ?

En tout état de cause, cela constitue un sujet ô combien épidermique, très effrayant pour les gouvernants et source d’une reprise communautariste évidente. Une décision pénale à l’encontre de l’association Mine de savoirs pourrait faire jurisprudence. D’ailleurs, la loi a souvent évolué au fil des jugements bousculant les codes en vigueur. Aymeric Robin espère « que ce débat sera au niveau où il doit être. J’ai reçu beaucoup de soutiens des autres maires du territoire », souligne le premier magistrat. Toutefois, aucun ne s’est risqué à un soutien public, la prudence demeure la règle sur le sujet !

Toutes choses égales par ailleurs, le changement d’une donnée dans cette équation pédagogique éviterait ce vide juridique dans lequel s’engouffre la libre interprétation. Cela souligne un manque de volonté de l’Etat, de courage face à un besoin de réforme, d’adaptation en 2017 d’un Code de l’Education suranné !

Daniel Carlier

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