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Valenciennois

(Rediff) Une dernière danse pour Sathya Sam

La soirée de clôture du festival Carrefour International au Phénix ce samedi 11 juin verra danser Sathya Sam, une petite étoile de mélancolie. Danseuse cambodgienne, réalisera sa dernière danse traditionnelle cambodgienne à Valenciennes (visuel Charlotte Saletsky au centre Sathy Sam et à droite Nathalie Le Corre).

Sathya Sam

Interview de Sathya Sam, danseuse cambodgienne

Une vraie reconnaissance pour l’espace Pasolini, où à la croisée des cultures, musiciens, chanteurs et danseurs venus des 4 coins de la planète ont posé leurs bagages remplis de toute la richesse artistique et culturelle de leur pays avec l’objectif de nous faire rêver !

Quelques instants partagés avec Sathya Sam. C’est elle qui nous accueille dans la cour de l’espace Pasolini, avec un sourire et quelques mots en français. Petit bout de femme brune, très fine, discrète, Sathya a de grands yeux marron qui en disent long. Elle a étonné l’équipe artistique du laboratoire Pasolini car elle a appris depuis sa dernière visite, un joli français. L’interprète prévue pour notre interview est réduite, presque, au silence, en sourit.

Petites confidences de Sathya Sam

Sathya SamElle est posée là timidement, sur le coin d’un canapé, qui paraît immense du coup. Toute petite, douce et calme,  l’ambassadrice de l’art de son pays dans le monde entier enseigne depuis 1989 la danse classique cambodgienne : « la danse Cambodgienne nécessite un grand travail sur le geste,  les mains et les bras sont retournés, on accentue la cambrure, ce que l’on ne fait pas en France. Le pied aussi c’est différent, nous on le pose à plat, vous en pointe », précise t-elle en mimant les gestes, avant d’ajouter en plissant les yeux « c’est très dur ». Le corps fatigue pour celle qui fût durant de nombreuses années l’une des premières danseuses remarquée du Ballet Royal de Phnom Penh où elle enseigne encore aujourd’hui. Ce samedi soir, Sathya Sam offrira sa dernière danse. Elle va entamer une autre carrière avec de grands chorégraphes contemporains européens et américains. La passion de la danse chevillée au corps. Son incroyable talent et sa grande maîtrise de la danse Khmer sont reconnus par tous, y compris aux premières loges, par Nathalie Le Corre de l’espace Pasolini, qui est très touchée « c’est un honneur avant sa nouvelle carrière, l’équipe de l’Espace Pasolini l’a rencontrée en 2008, année pendant laquelle elle a participé au projet « Résident du Monde ». Elle a choisi l’Espace Pasolini et le projet du Carrefour International dont elle garde un souvenir unique pour faire ses derniers pas de danseuse traditionnelle. Cette fois, elle est  accompagnée d’un musicien et danseur traditionnel ».

Les coups de coeur de Sathya pour Perséphone et Peter Sellars.

La danseuse a fait le tour du monde, Singapour, Amsterdam, USA, Europe, etc. pour porter ce symbole de l’identité Khmère, le Ballet Royal du Cambodge et ses danses traditionnelles, chef d’œuvre au Patrimoine de Unesco, qui s’incarnent dans la délicatesse des gestes et la magnificence des costumes.
Les étincelles dans les yeux sont intactes et la passion n’a pas pris une ride. Sathya Sam entame une nouvelle carrière. Et de jolie manière, par un véritable coup de cœur pour Perséphone de Peter Sellars. Elle l’annonce comme un cadeau : « Peter Sellars m’ a demandé de travailler avec lui ». Et voilà Sathya Sam embarquée dans un opéra. « Moi j’aime bien l’histoire de Perséphone », confie t elle. Un grand moment pour elle. Des émotions très fortes « je n’ avais jamais fait ces émotions », murmure t elle, la main posée sur le cœur.  Alors Sathya, en quoi la danse contemporaine diffère t-elle de la danse traditionnelle ?« les mains, le corps, les gestes et les mouvements sont différents », explique t-elle avant d’ajouter «  moi je voulais apprendre ». Tout simplement. Une volonté de fer dans un p’tit bout de femme. Sathya  travaille avec des chorégraphes contemporains « pour apprendre les idées et des gestes ».  Mais alors amenez-vous des gestes de la danse Cambodgienne à la danse contemporaine ?  « Oui ! » acquiesce t -elle. Les chorégraphes la guident, elle ajoute en souriant « mais ce n’est pas comme dans Le lac des cygnes ».  C’est mignon.

«C’est où le Cambodge, m’dame ? ». Les scolaires du territoire arrosés de culture internationale.

Toujours un moment fort dans la culture du territoire, ce festival nomade  a réuni des artistes traditionnels porteurs de leur civilisation qui sont venus  d’Afrique du Sud, de Corée, d’Iran, du Cambodge.  Une tournée culturelle sur l’agglomération de Valenciennes et du Val de Sambre, qui a permis aux scolaires  de découvrir différentes cultures. C’est un moment qu’elle affectionne tout particulièrement. La danseuse  adore ces instants avec les enfants, « c’est très intéressant, surtout le travail avec les scolaires. Les enfants ne connaissent pas la danse cambodgienne, c’est une grande découverte pour eux. Et peu savent que le Cambodge est un pays,  encore moins où il se situe… ».

Ce Carrefour International a permis, à un large public de découvrir,  tout naturellement, de nombreuses cultures, offertes par ces artistes passionnés grâce à la maison Pasolini. Tout naturellement. Des cadeaux dont il ne faut pas sous-estimer la grande valeur.  Sathya Sam, elle, a connu  la dictature de Pol Pot, ce temps où toutes formes d’expressions artistiques étaient bannies, où les intellectuels devaient même se débarrasser de leurs livres pour échapper aux persécutions.  La dureté. La rigidité. L’enfermement. La froideur. Elle en parle « après Pol Pot le dictateur, je suis venue en France sur la grande place à Paris, c’est la princesse du Cambodge qui m’a invitée, puis ensuite Bruxelles, l’Espagne, la Suisse, beaucoup en Europe… Alors moi à l’école de danse  au Cambodge, j’aime apprendre aux danseuses, je leur apprends à mettre des  émotions dans les gestes ». Sathya est maman d’une jeune fille « je veux ouvrir l’éducation de ma fille. Elle choisira elle même ce qu’elle veut faire ». On comprend. On sait qu’elle lui transmettra  ce qu’elle aime le plus, comme  elle le dit dans notre langue avec un petit accent Cambodgien « quand les yeux et le cœur sont reliés, cela crée des émotions immenses… ». Oui Sathya, oui, vous avez tellement raison… !

Celine Druart Beaufort

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