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(TEREOS) Deux nouveaux dépôts de plainte ce lundi 11 mai et plus à venir…

La pollution organique de l’Escaut, dans la nuit du 09 et vendredi 10 avril, commence à prendre un corps judiciaire de plus en plus sérieux à travers deux nouveaux dépôts de plainte en France, d’autres réfléchissent sur le sujet. Toute chose étant égale par ailleurs, cette catastrophe écologique suscite une kyrielle de questions de part et d’autre de la frontière avec la Belgique (visuel d’un site TEREOS sur la Betterave, sa transformation constitue l’origine de cette pollution organique).

Georges Flamengt, président projet Sage-Escaut : « Nous déposons plainte contre X ce lundi 11 mai pour atteinte à l’environnement »

La multinationale TEREOS dans le domaine agricole est au coeur d’une Affaire environnementale dont l’impact, totalement sous cloche durant ce confinement, commence à émerger à la surface. En effet, si cette pollution consécutive à la rupture d’une digue dans un bassin de décantation de betteraves sur Escaudoeuvres fut l’objet d’une action rapide à l’endroit des maisons inondées, elle pose des questions sur la mise en oeuvre, ou pas, de toutes les mesures conservatoires afin de préserver la population piscicole de l’Escaut (https://www.va-infos.fr/2020/05/02/tereos-seuls-les-poissons-morts-ont-tout-compris-1-3/).

Pour le Président du projet Sage-Escaut, porté le SyMEA (Syndicat Mixte Escaut et Affluents), les besoins de réponses sont immenses. « Je reproche à l’entreprise TEREOS un manque de vigilance. Elle a connu des précédents en terme de rupture de digues. A-t-elle prise toutes les mesures nécessaires suite à ces incidents ? Ensuite, nous redoutons les conséquences aquatiques pour l’Escaut. Nous voulons plus d’informations dans un dossier où Tereos a indiqué qu’elle assumerait toutes ses responsabilités. C’est pourquoi, nous déposons plainte contre X ce lundi 11 mai pour atteinte à l’environnement sur la base du Code de l’Environnement », précise Georges Flamengt,

La directrice du SyMEA, Audrey Lieval, précise « un dépôt de plainte pour préjudice écologique ». Cette dernière explique ses nombreux échanges avec des collègues belges où l’Affaire a pris un volume national. « Le ministre de l’Ecologie de la Wallonie est venu sur un site wallon pour constater les dégâts. Ce même jour, les services de Wallonie ont procédé à une opération de repérage de la population piscicole. Sur 200 mètres, ce service à trouvé… une anguille et rien d’autres, un carnage ! », commente Audrey Lieval.

« L’Escaut n’est pas la Seine en France », Audrey Lieval

Un élément factuel d’une cruelle acuité est aussi à prendre en compte. L’Escaut dont une partie importante du fleuve se situe en Flandres belge constitue un axe fluvial majeur en Belgique, pas chez nous ! « L’Escaut n’est pas la Seine en France », commente Audrey Lieval.

Dans cette optique, la concomitance de cette pollution organique en France, puis en Belgique, dont l’enquête lancée par le Parquet de Cambrai déterminera ce lien de causalité, fut terrible Outre Quiévrain. « Ce fut une catastrophe écologique en Wallonie. Fort de cela, la Wallonie a prévenu les autorités des Flandres qui ont oxygéné massivement l’Escaut, fermer des écluses sur la commune de Gand…, et de fait a réussi à limiter considérablement la mortalité piscicole dans la Flandre belge », poursuit-elle.

La grande question est pourquoi diable les autorités wallonnes n’ont pas-t-elle été prévenues par les autorités françaises au même titre que les Flandres belges par ses voisins wallons ?

« Nous n’avons reçu aucune information par la Préfecture de Région sur cette pollution ! », Grégory Lelong

Si l’enquête judiciaire déterminera les tenants et les aboutissants de cette pollution organique conduisant à réduire l’oxygène dans l’eau. « La mort des poissons, c’est l’arbre qui cache la forêt ! Cette pollution organique détruit toute vie. Même si le taux d’oxygène revient à un niveau suffisant, Il est donc inutile de réempoissonner maintenant ! Il faut d’abord reconstituer la chaine alimentaire afin d’atteindre un niveau de vie correct. A cette heure, les poissons (encore) présents n’ont plus rien à manger… ! », poursuit Audrey Lieval.

A l’heure du Covid-19 où le couple Maire/Préfecture est porté aux nues, où l’édile est cajolé par l’exécutif, on s’étonne, voire on s’étrangle, en écoutant le Président du Parc Régional Scarpe/Escaut, et maire de Condé-sur-l’Escaut. « J’ai appris cette pollution par la presse. Je n’ai pas reçu la moindre information sur cette pollution dans l’Escaut par les services de l’Etat », explique-t-il.

Et en même temps, la DREAL a effectué des prélèvements très rapidement comme le précise un communiqué de presse du 24 avril de la Préfecture de Région Hauts-de-France. « Comme commune proche de l’Escaut, les services de l’Etat n’ont pas essayé de nous demander un constat de cette pollution, une participation, un retour de terrain. Nous essayons d’avoir plus d’informations », poursuit-il.

Comme Président du PNR Scarpe Escaut, la possibilité d’ester en justice « est difficile puisqu’il est nécessaire d’avoir un-intérêt à agir-. Par contre, nous réfléchissons à une action au niveau transfrontalier avec le Parc de la Plaine de l’Escaut. Nous avons également parlé de ce sujet au dernier Bureau communautaire de Valenciennes métropole (07 mai) avec éventuellement une action concertée », précise le premier magistrat de Condé-sur-l’Escaut. Au niveau d’une autre EPCI concernée, celle du Cambrésis, une source proche du dossier nous indique « qu’il n’y avait pas d’action en justice à cette heure ».

« Le silence incroyable des élus, notamment celui de Xavier Bertrand », Tomjo (journaliste indépendant), et membre de l’Association Pour La Suppression Des Pollutions Industrielles

L’association ASPI n’est pas une inconnue dans le monde environnemental. « Nous avons bloqué le projet de la Friche Saint-Sauveur (Métropole Lilloise) à travers un référé administratif au Tribunal de Lille. Après les élections municipales, nous attendons le jugement sur le fond. Sur ce dossier, nous déposons plainte conjointement avec l’association « Nord Nature » contre TEREOS ce lundi 11 mai. Une pollution avérée dans l’Oise avait déjà eu lieu en 2018, mais également une rupture sur la même digue en février dernier», explique le journaliste. Sur ce dernier point, la Directrice de SymEA pose la question « je n’arrive pas à obtenir un retour sur cet incident de février 2020 afin de savoir si cet accident provient de la même digue que celle d’avril 2020 ou d’une autre. Cela ferait partie du secret de l’instruction. En effet, ce serait plus inquiétant (encore) si cette rupture en février provenait d’une autre digue… ! C’est mon point de vue », précise-t-elle.

Ensuite, le fait troublant est « le silence des élus, notamment celui de Xavier Bertrand, président de la Région des Hauts-de-France qui connaît parfaitement TEREOS puisqu’il y effectuait une visite dernièrement, mais également du Ministère en charge de l’écologie, et des élus des territoires concernés. La Ministre de l’Ecologie wallonne essaye de contacter désespérément Emmanuel Macron, un courrier officiel serait parti à destination du Chef de l’Etat français », poursuit le journaliste (plus d’infos sur https://chez.renart.info/?De-l-Escaut-a-l-Amazonie-Beghin-Say-ou-la-catastrophe-permanente).

Vraiment, ce silence est incompréhensible, car ce fleuve de l’Escaut est complètement intégré dans une vision transfrontalière à travers la fameuse CIE (Commission Internationale de l’Escaut).

Une action européenne

Toujours est-il que peu à peu le déconfinement pourrait raviver la flamme de cette recherche de cause d’une pollution organique en France vers l’Escaut belge. L’entreprise TEREOS demande aux autorités belges de prouver le lien entre la pollution organique, constatée sur Escaudoeuvres, et celle provoquant un massacre piscicole en Belgique, comme en France. L’enquête déterminera le lien de cause à effet, mais le timing est pour le moins troublant. « TEREOS joue sur le fait qu’une autre entreprise aurait pu profiter de cette pollution en France pour polluer en Belgique. L’entreprise TEREOS demande donc aux autorités belges de prouver le lien entre ces deux pollutions organiques », précise Audrey Lieval. Décidément, l’écologie pour une planète « B » est encore très vivace.

Le Covid-19 occupant la totalité de l’espace médiatique a complètement occulté cette catastrophe écologique en plein confinement. L’excuse du COVID ralentissant la diffusion de l’information n’est pas recevable face à un pays, en rapport à sa population, le plus durement touché au monde par cette pandémie. « Lorsque la mortalité piscicole est devenue significative coté français, des premiers signes de pollution ont également été mesurées coté belge. Dès lors, un échange a été instauré entre les services… des deux pays », indique le communiqué de presse du 24 avril 2020 de la Préfecture des Hauts-de-France.

Le problème est qu’une fois la mortalité constatée Outre-Quiévrain, il était trop tard, l’hécatombe était en marche. Pour sa part, les autorités wallonnes ont prévenu à temps les autorités des Flandres belges lui permettant de fait d’agir en amont….des premiers poissons morts, bien avant les premiers ravages de cette pollution organique. En fait, plus que cette pollution, le fait d’une absence d’informations dans le sens France Belgique passe très très mal, ceci expliquant certainement le portage de ce dossier vers des sphères plus hautes. En effet, ce dossier n’en restera pas là, des députés européens français et belges s’intéressent de très près au sujet.

L’heure de l’écologie n’est plus à une marée noire de l’Erika où Dominique Voynet se trouvait en vacances à La Réunion. Interrogée sur place pour savoir si elle comptait se rendre sur les lieux, elle commençait par déclarer que « cela ne servirait à rien ! » Ce temps là est révolu, il faudra se justifier à tous les niveaux de la chaîne de responsabilité en France. 

Daniel Carlier

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