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Patrick Kanner : « La région ne peut être le paillasson des ambitions présidentielles de Xavier Bertrand » (1/2)

Le chef de file du Parti Socialiste pour cette élection régionale était en visite sur la commune de Douchy-les-Mines, puis Petite-Forêt. L’occasion pour lui d’envoyer un message d’union de la gauche, mais également quelques flèches décochées à l’endroit du président sortant, Xavier Bertrand. L’épée est sortie du fourreau, les régionales peuvent commencer pour le grand public.

Patrick Kanner : « Les 15 prochains jours seront déterminants ! »

La venue de l’ancien Ministre de la ville, de la jeunesse, et des sports, désigné comme chef de file du Parti Socialiste pour les régionales depuis le 15 octobre 2020, n’est pas un hasard sur un territoire où l’empreinte politique de gauche est encore très présente sous toutes ses composantes. Autour de Patrick Kanner, Benjamin Saint-Huile, maire de Jeumont, Sandrine Gombert, maire de Petite-Forêt, et Sarah Kerrich, avocate.

Romain Merville, élu à la ville de Douchy-les-Mines, organisateur de cette demi-journée dans le Valenciennois avait l’honneur d’introduire cette rencontre : « Sur ce territoire, nous connaissons le prix de la division, c’est élection de Sébastien Chenu dans la 19ème circonscription de l’extrême droite dure. Ensuite, lui qui veut respecter l’ordre contourne la loi (celle du non cumul) en lançant un recours aux municipales afin de se présenter aux régionales comme élu sortant ». Patrick Kanner prend la parole pour balayer ce candidat « a-t-il sa propre autonomie ou est-il juste le bras armé de Marine Le Pen ? ».

Patrick Kanner en conversation avec Bernadette Sopo dans l’attente de la décision du Conseil d’Etat pour l’élection à La Sentinelle

Pour autant, Patrick Kanner est venu pour porter un message fédérateur à gauche, mais également pour tacler un candidat dont l’ambition présidentielle est affichée depuis qu’il n’est plus Macron-Premier ministrable. En effet, depuis l’avènement de Jean Castex, tout a changé.

La mémoire en politique est indispensable, Patrick Kanner rappelle les conditions de l’élection de l’actuel président de région. « L’addition des listes, Fabien Roussel, Sandrine Rousseau, et Pierre de Saintignon nous positionnait au 1er tour au dessus de Xavier Bertrand. Aujourd’hui, il y a 4 forces principales (EELV, le PCF, le PS, et LFI), si nous partons séparés, personne ne sera au second tour, et la gauche sera encore absente pendant 6 ans du Conseil régional des Hauts-de-France », commente Patrick Kanner.

Quel est le contexte politique en 2021 ?

Avant d’aller plus loin dans l’intervention des personnalités présentes, il est utile de faire un arrêt sur image pour mieux comprendre le contexte politique. En 2015, Xavier Bertrand est élu à la Présidence de la région des Hauts-de-France grâce au désistement de la liste de Pierre Desaintignon. Sa majorité est composée d’élu(e)s LR, dont nous connaissons clairement le point politique, le Modem où l’attrait d’une nouvelle alliance n’est pas gravé dans le marbre, et l’UDI dont seul Dieu connaît l’inclinaison politique.

Cinq départements composent cette région dont la population décroît. « Une région dont la population baisse n’est pas en bonne santé », commente Patrick Kanner. Vous avez le Nord et le Pas-de-Calais historiquement de gauche dont l’électorat n’a pas basculé à droite comme par enchantement. De son coté, la Picardie développe un électorat fort à l’extrême droite. « D’ailleurs, la Picardie y trouve-t-elle son compte dans cette super région ? », commente Patrick Kanner, une phrase ne manquant pas de sel face au Picard sortant… !

Ensuite, vous avez l’apparition de deux nouveaux partis politiques par rapport à 2015, LREM et La France Insoumise dont leurs poids n’est pas le même qu’à la présidentielle sauf cécité. Des membres de la majorité de Xavier Bertrand sont partis vers LREM « comme le vice-président à la culture non remplacé depuis juillet 2019 », souligne Patrick Kanner, mais également des recrues potentielles sur la future liste du sortant comme Anne-Laure Cattelot (Député LREM 12ème circonscription).

Certes, Xavier Bertrand est présenté, sondages à l’appui, comme le super favori de cette élection, un boulevard annoncé sauf que…, l’analyse est trop simpliste. En effet, si les 4 partis de l’écologie sociale partent avec la seule ambition de figurer dans l’hémicycle, c’est plié. Par contre, si plusieurs formations politiques de gauche partent unies, ils atteignent le second tour. A ce moment là, la dite liste pourrait bénéficier d’un contexte politique particulier.

En effet, Marine Le Pen n’est pas présente ce qui change tout dans le rapport de force sans faire injure au député de la 19ème. Même un bus avec ce duo en photos ne ramènera pas sur le bulletin de vote la cheffe de file nationale.

Ensuite, le parti LREM n’a aucun intérêt à présenter une liste quasi battue d’avance, mais bien au contraire ces sympathisants pourraient voter comme un seul homme contre Xavier Bertrand, un vote utile pour leur champion à l’Elysée. L’UDI, le Modem, que feront les électrices et les électeurs dont les politiques ne détiennent pas leur bulletin de vote ? En résumé, pour un second tour, le danger pour Xavier Bertrand dans la configuration d’une triangulaire serait de faire le plein au 1er tour…, et puis c’est tout. C’est pourquoi, cette élection régionale dans les Hauts-de-France s’annonce passionnante contre toute attente… !

« Créer un consensus gagnant-gagnant à gauche ! », Patrick Kanner

Le sénateur du Nord est parfaitement conscient d’un passé glorieux, voire d’un présent plus difficile : « Nous avons eu des hauts et des bas, et même beaucoup de bas. Après les Présidentielles, les européennes, certains voulaient nous envoyer au garage comme un astre mort. Par contre, nous avons démontré aux municipales que nous restons la 1ère force de gauche dans le Nord ».

Afin d’éviter le virus de la désunion à gauche, le chef de file du P.S admet un diagnostic commun. « Deux sondages, un public, un privé, annoncent Xavier Bertrand largement vainqueur. Il faut créer un consensus gagnant-gagnant à gauche. Bien sûr, sur des dossiers spécifiques, nous pouvons avoir des divergences profondes, mais ne pouvons pas bâtir un projet régional. En tout état de cause, nous avons prouvé aux municipales qu’on ne pouvait pas construire sans le P.S. Nous pouvons partir en conquête ensemble avec le PCF, LFI, et EELV », indique Patrick Kanner.

Les échanges entre les formations politiques laissent à penser que le mouvement EELV, fort des résultats aux européennes, voire du second tour des municipales, partira seul. « EELV veut se compter partout », déclare Patrick Kanner.

Et par effet de vase communicant, un nouveau parti comme LFI a tout intérêt à participer à une alliance pour encore peser, être encore en haut de l’affiche ! « Il semble que depuis quelques temps, le PS ne serait plus infréquentable par La France Insoumise. Une stratégie régionale n’est pas une stratégie présidentielle. Avec  le PCF, nous avons une plus longue habitude pour des accords électoraux même si je vois ici et là des affiches, c’est bien normal », explique Patrick Kanner.

Le message subliminal envoyé aux autres forces de gauche est qu’il vaut mieux jouer la course pour une gagne collective, pour le second tour, plutôt que de réaliser un passage furtif à la Benoît Hamon, dévastateur pour tous !

Il conclut son propos sur la temporalité… « les 15 prochains jours seront déterminants ! »

« Quel est le bilan de Xavier Bertrand  ? », Patrick Kanner

Le Président sortant est dans la ligne de mire du chef de file PS pour les régionales. « Connaissez-vous le nom d’un vice-président ? Xavier Bertrand exerce un pouvoir solitaire. A l’Elysée, nous avons Jupiter, à la région, un petit Jupiter. Il dit tout haut qu’immédiatement après le résultat de cette élection régionale, il partirait pour sa campagne présidentielle. La région ne peut être le paillasson des ambitions présidentielles de Xavier Bertrand », explique Patrick Kanner.

Bien sûr, le programme 2015 du sortant n’est pas épargné : « Quel est le bilan de Xavier Bertrand ? L’emploi proche, son système n’a pas fonctionné. C’est Pôle Emploi en moins bien. Le recul du RN, il est toujours plus présent. Les Grands projets, où sont-ils ? Enfin, concernant le Canal Seine Nord, je lui reproche d’avoir cédé à Edouard Philippe qui ne voulait pas, comme maire du Havre, de ce projet. Il a régionalisé ce projet, et ce sont les contribuables des Hauts-de-France qui vont payer ce CNSE, et l’Europe dont nous avons été cherché le financement ». La convention financière Etat/région a été signée début octobre 2019 avec un calendrier (potentiel) d’achèvement en 2028.

Benjamin Saint-Huile

Pour sa part, le maire de Jeumont exhorte « une union de la gauche. Nous devons ancrer cette capacité à travailler ensemble. Je ne peux plus supporter que 25% des électeurs de la région ne soient pas représentés dans l’hémicycle ».

Pour Sandrine Gombert, le P.S n’est plus dans les limbes post présidentielle : « Les socialistes sont toujours là. Nous sommes prêts à cette union, car nous ne pouvons pas risquer de ne pas être présent au second tour ».

Voilà une élection régionale dont le démarrage, toutes formations confondues, s’annonce à la hauteur de l’enjeu. Plus que partout ailleurs, le résultat politique de la région des Hauts-de-France pourrait être un miroir pour l’opposition Présidentielle en 2022, à gauche, à droite, et au Rassemblement national… !

Daniel Carlier

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