Le CISPD en lutte contre le sentiment d’insécurité
Trois communes du Valenciennois sont à la manoeuvre contre un mal du quotidien, le sentiment d’insécurité, Anzin, Raismes, et Petite-Forêt au sein d’un CISPD (Conseil Intercommunal de Sécurité et de Prévention de la Délinquance), pas unique sur le territoire, mais également à travers une police pluricommunale, cette fois très innovante.
(De gauche à droite, la substitut du Procureure, le maire d’Anzin, le maire de Raismes, la maire de Petite-Forêt, et le Sous-Préfet de Valenciennes).
Retour sur une histoire intercommunale où Anzin, Beuvrages, Bruay-sur-l’Escaut, et Raismes lancent en janvier 2015 un CISPD dont l’objectif premier était de mettre sur les fonts baptismaux une police pluricommunale. Attention, la sémantique n’est pas anodine en la matière, elle n’est pas intercommunale puisque les collectivités locales participantes font partie de deux communautés d’agglomérations différentes (CAVM, CAPH), mais pluricommunale !
Cette dernière opère sur le terrain dès 2019, avec le ralliement de la commune de Petite-Forêt, sur ses communes où « au début, nous travaillions quartier par quartier, car nos rues sont accolées, un trottoir sur une ville et en face sur une autre, mais nous nous sommes rendus compte avec le temps que travailler sur l’ensemble du périmètre des communes était plus pertinent », commente Pierre-Michel Bernard, le maire d’Anzin.
Ensuite, chemin faisant, désaccords à l’appui, ce CISPD s’est réduit à 3 communes, Petite-Forêt, Anzin, et Raismes sans altérer l’ambition de cette organisation.
Un diagnostic éclairant
Dans cette optique, le CISPD a lancé un diagnostic de janvier à mars 2022. « Nous avons été surpris par le nombre de retour d’un questionnaire sur le sujet de l’insécurité. La sécurité routière est arrivée en tête des inquiétudes des habitants de nos trois communes, car peu ou prou, on retrouve des problématiques identiques », déclare Sandrine Gombert, l’édile de Petite-Forêt.
Plus globalement, le Président du CISPD, Aymeric Robin depuis le 01 janvier 2023, résume les axes de travail, la délinquance routière, les problèmes de voisinage, les dépôts sauvages, des thématiques déjà traitées, mais également de nouvelles pistes de progrès avec le décrochage scolaire et les violences intrafamiliales.
La maire de Petite-Forêt revient sur l’inquiétude de la délinquance routière, la vitesse excessive, les rodéo urbains, mais pas que, les trottinettes électriques, le stationnement gênant. « C’est pourquoi, nous lançons des actions de prévention, mais également une cellule de veille où tous les mois, les acteurs de la commune, la Police nationale, la Police municipale, etc., trouvent des solutions, lancent des actions de prévention comme dans les collèges et les écoles communales », précise Sandrine Gombert.
Autre sujet de taille, les problèmes de voisinage sont sur le devant de la scène, car la pandémie durant deux ans a isolé psychologiquement les administrés. « Les gens ne se parlent plus depuis La Covid. Pour le moindre problème, ils font appel à nous. Pour un simple problème d’emplacement d’une poubelle, ils téléphonent sans prendre le temps de demander à leur voisin », commente le responsable de la police pluricommunale, Frédéric Smigielski. Sur le même registre, Odile Soyez, coordinatrice du CISPD depuis novembre 2021, commente « un appel à la Police Pluricommunale pour indiquer que le voisin, en plein travaux de carrelage, génère de la poussière chez moi… ». Bref, les citoyennes et les citoyens ne se parlent plus, c’est sans doute le dommage collatéral le plus palpable en sortie de Covid.
Ensuite, la lutte contre les dépôts sauvages, en zone urbaine ou forestière comme sur Raismes fait déjà l’objet d’une action très volontariste souligne la Substitut du Procureure, Mme Dalbera : « Le Procureur de Valenciennes, Jean-Philippe Vicentini, aujourd’hui sur le ressort d’Amiens, a signé avec les deux anglo et l’ONF une convention pour mettre en oeuvre un circuit pénal court. Dès la matérialisation des faits, une procédure accélérée est lancée contre l’auteur.e ».
Le parquet est également très actif, sur ce circuit pénal court, concernant les rodéos urbains où « après identification, nous initions une procédure adaptée avec une garde à vue systématique, voire une comparution immédiate », ajoute Mme La substitut. Toutefois, Frédéric Smigielski ajoute « rodéos urbains, mais également dans la forêt. Sur l’agglomération lilloise, les terrils et sites associés du Valenciennois sont très prisés pour du cross ».
« On constate l’émergence d’une prostitution des mineurs », Pierre-Michel Bernard
Le maire d’Anzin revient sur la thématique des dépôts sauvages avec « le coût pour la commune, ramassage des déchets, très important notamment dans le cas de l’amiante ».
Bien sûr, le décrochage scolaire constitue un sujet de premier plan. Il résulte également d’une fragilité sociale croissante et doit être traité comme un axe de prévention absolument incontournable. Beaucoup d’acteurs sont déjà sur la thématique comme l’Ecole de la Seconde Chance du Hainaut, mais en parallèle de cette jeunesse en errance, perdue, sans ressources, un phénomène arrive sur le Valenciennois.« On constate l’émergence d’une prostitution des mineures. Je n’avais jamais vu cela depuis que je suis maire (2008). Il faut travailler avec les bailleurs sociaux, nos partenaires dans l’Education nationale… », commente Pierre-Michel Bernard. « On observe également des logements loués en Airbnb (par des proxénètes) pour cette prostitution des mineures. Parfois, vous avez également des jeunes indépendantes, perdues, et sans ressources, qui se prostituent de leur plein gré », ajoute le chef de la Police pluricommunale. A ce titre, deux « Cité Educative » sont en vigueur sur le Valenciennois, dispositifs de l’Etat, sont déployés sur le Valenciennois, Valenciennes-Anzin, et Raismes, Beuvrages, Escaupont, et Bruay-sur-l’Escaut.
Un autre sujet de taille, les violences intrafamiliales, un fléau sur le Valenciennois depuis des lustres, mais qui comme d’autres thématiques a pris plus d’ampleur avec la Covid. « Sur nos 3 communes, les violences intrafamiliales représentent 12,5% des plaintes enregistrées, voire 6,6% sur la seule commune d’Anzin », explique Pierre-Michel Bernard. De facto, la prévention des addictions, drogue, alcool…, participe mécaniquement à cette lutte contre les violences intrafamiliales.
La présence du nouveau Sous-Préfet de Valenciennes marque l’importance de l’action de l’Etat dans la réussite de ce dispositif ambitieux. « Nous avons également mis en place les AFD (Amende Forfaitaire Délictuelle) concernant l’usage des stupéfiants, déchets sauvages avec au final une sanction moins lourde, mais plus efficace. Justement sur le sujet des rodéos, nous avons entrepris en 2022, 17 opérations coup de poing, contre les rodéos urbains, mais aussi la venue d’un hélicoptère pour repérer les auteurs et les sites en question », commente Guillaume Quennec, le Sous-Préfet de Valenciennes. Ces avancées sont importantes. En effet, même si la sanction est minorée, son efficience est plus grande, notamment financière. Aucun doute, la rapidité de la justice du quotidien est source d’efficacité, d’un effet boule de neige, car elle fait à bas bruit un écho chez certains habitués, très adepte du pas vu, pas pris… !
Daniel Carlier