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« Les fausses consignes » ou la fausse bonne idée ?

Depuis quelques mois, le Gouvernement est revenu à la charge avec une idée, partiellement enterrée durant deux ans, sur le recyclage des bouteilles plastiques. En effet, l’exécutif propose un dépôt des bouteilles plastiques au sein de la grande distribution, afin de recyclage dans la filière dédiée, assortie d’une hausse de 0,20 centimes à l’achat d’une bouteille d’eau minérale par exemple. Cette idée d’une consigne renaissante suscite un carton rouge dans le monde des collectivités locales et des organismes de recyclage des déchets ; une opposition frontale est à l’ordre du jour entre le Ministère de la Transition écologique et l’ensemble des maires de France, une de plus !

Charles Lemoine, président du SIAVED : « Cette initiative ne va plus inciter les producteurs (notamment de boissons) à se tourner vers le verre »

Dans les contours de la loi AGEC, contre le gaspillage et bien au delà, le Ministère en charge du dossier a relancé l’idée d’une consigne pour les bouteilles plastiques. Cette dernière serait assortie d’une hausse du coût de la bouteille plastique de 0,20€, payée de fait par le consommateur final, et serait remboursée par les enseignes de la grande distribution sous la forme de leur choix, bon d’achat, point carte de fidélité, etc. Ensuite, les enseignes nommées se chargeront de faire suivre ces déchets plastiques dans la filière de recyclage appropriée. A l’emporte-pièce, on pourrait croire que l’idée d’une résilience de la consigne est pertinente, sauf que l’enfer est pavé de roses comme cette initiative dès lors que nous parlons de sa mise en oeuvre.

Dominique Adel, responsable du Prévention et Collecte au sein du SIAVED, fustige cet éventuel dispositif : « Tout d’abord, c’est une perte de recettes sèche (750 000 € pour le SIAVED) pour tous les syndicats publics collecteurs de déchets puisque nous ne valoriserons plus ces bouteilles plastiques. A ce titre, CITEO subventionne principalement cette valorisation. Ensuite, cela modifie complètement le process de collecte pour les particuliers. Cela ne sera plus la poubelle jaune pour le tri, mais leur choix de venir avec ces bouteilles au sein des enseignes de la grande distribution. Enfin, cette idée fait fi des investissements des organismes publics, comme le SIAVED, pour le recyclage et plus encore pour le réemploi de ces déchets plastiques ».

Sur la même ligne, le Président du SIAVED est vent debout contre cette initiative. « Ce sont des fausses consignes qui vont perturber le particulier, profiter au final aux grandes enseignes au détriment du commerce de proximité (bons d’achat…), et de plus ce dispositif ne va plus inciter les producteurs (notamment de boissons) à se tourner vers le verre. D’autre part, les enseignes de la grande distribution vont au mieux d’adresser aux mêmes opérateurs de la filière de recyclage que nous, mais également ne jamais se tourner vers le réemploi d’une partie de ces déchets plastiques. Nous le faisons régulièrement ». On rappelle que le verre est la matière observant un cycle parfait, 100% réutilisable. Ensuite, le recyclage implique un broyage de la matière afin de la recycler, tandis que le réemploi est le nouvel usage de la matière brute, une seconde vie très tendance baptisée surcyclage.

Il ne faut bien sûr pas occulter le volet financier, les projets d’investissement du SIAVED, et de bien d’autres en France, sur les prochain Centres de tri publics avec extension des consignes de tri prennent en compte la valorisation de ces bouteilles plastiques, et par suite de la recette associée. « Cela pourrait bouleverser notre dossier. Toutes les collectivités territoriales et locales sont radicalement contre ce projet », poursuit-il.

« L’AMF et toutes les associations de maires s’élèvent contre ce projet », Charles Lemoine

Bien sûr, les remontées n’ont pas tardé auprès des associations représentatives, mais également des associations comme AMORCE (https://amorce.asso.fr/), voire le Cercle National du Recyclage. A ce titre, le Président de l’AMF, David Lisnard, a réagi très vigoureusement à travers un courrier : « Ce dispositif complexifierait le geste de tri, encouragerait indirectement la consommation des bouteilles en plastique, ne bénéficierait qu’aux producteurs, ne contribuerait pas à réduire la pollution plastique, impacterait le pouvoir d’achat de français, constituerait une perte de recettes pour les collectivités publiques, et amplifierait les fractures territoriales ». Cela n’est pas écrit, mais il faut se dire les choses ; cette idée sent à plein nez le lobbying des producteurs de boissons avec des bouteilles plastiques.

« L’AMF et toutes les associations de maires s’élèvent contre ce projet, c’est un tollé général dans les collectivités locales. Nous espérons clairement que ce dossier ne sera pas mis en oeuvre par le Ministère de la Transition écologique », conclut Charles Lemoine.

On attend la vraie bonne idée dans son effectivité comme la judicieuse obligation imposée aux déstockeurs de ne plus rien jeter (loi AGEC), pourtant simple une idée… applicable sans dommages collatéraux !

Daniel Carlier

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