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Le centre pénitentiaire annoncé fait débat débat dans le Valenciennois

L’arrivée d’un centre pénitentiaire sur Saint-Saulve, en plus des sites existants comme la Maison d’Arrêt sur Valenciennes et d’un Etablissement pour Mineurs sur Quiévrechain, a fait son effet dans le Valenciennois où le week-end a été très agité sur les réseaux sociaux. Rencontre avec Jean-Noël Verfaillie, le maire de Marly, et Yves Dusart, édile de Saint-Saulve avec une interview avant et d’autres interventions durant le Conseil municipal de ladite commune d’accueil.

Entre « incompréhension » pour le maire de Marly et « sérénité » pour l’édile de Saint-Saulve

Cette histoire repose d’abord sur un projet de loi du Garde des Sceaux, Eric Dupont-Moretti, validé à ce stade en 1ère lecture (13 juin 2023) par les deux Chambres parlementaires en attendant la suite de son cheminement. Ce projet de loi en attente de promulgation valide la création de 15 000 places supplémentaires de prison. « La surpopulation carcérale est de 121% en France. Par exemple, la Maison d’Arrêt de Valenciennes a 172 places pour 296 détenus avec un taux de surpopulation récurrent de 150% », commente Loïc Ruol, élu à la commune de Saint-Saulve et avocat au barreau de Valenciennes.

Sur ce point, Yves Dusart précise que « c’était le dernier site à trouver par le Ministère de la Justice afin de boucler son projet de 15 000 places ». Ensuite, le Lillois était pressenti, pourtant déjà richement doté, mais une « difficulté environnementale à écarter le projet sur Loos. Le Valenciennois pouvait s’engouffrer dans la brèche », ajoute-t-il. A ce titre, Loïc Ruol confirme « Valenciennes Métropole a contacté le Ministère de la Justice pour proposer un terrain susceptible de répondre aux attentes… ». C’est clairement une démarche volontariste du Président de Valenciennes Métropole. Bien sûr, le sujet du volet républicain de la surpopulation carcérale ne fait pas débat, dans une démocratie qui se respecte, mais l’emplacement fait clairement causer dans les chaumières.

Enfin, calibré à 700 places sur Saint-Saulve, ce projet ramène mécaniquement « 700 habitants sans aucun service, voire frais financier pour la municipalité. Cette nouvelle population restera, elle ne vieillira pas sur la commune. Un départ sera toujours remplacé », précise le maire. Le souci, comme pour toutes les collectivités locales, de la baisse de population n’est pas neutre dans cette équation, mais nous y reviendrons dans la suite de ce reportage.

« Le projet du Grand Cavin est remis totalement en cause », Jean-Noël Verfaillie

Dès vendredi, le maire de Marly a fait part de sa stupéfaction suite à l’annonce officielle d’un futur Centre de détention sur Saint-Saulve : « Je suis dans l’incompréhension. La balance n’est pas équilibrée ! Nous avons déjà une Maison d’Arrêt sur Valenciennes et un Centre pour Mineurs sur Quiévrechain. D’autres territoires moins urbanisés pourraient remplir leur mission dans le domaine ».

Ensuite, il ne comprend pas la validation du projet par la mairie de Saint-Saulve : « Je pense que le maire n’a pas envisagé toutes les conséquences ». Quelles sont-elles selon l’édile de Marly ? En effet, pour ce dernier, le projet « du Grand Cavin est remis totalement en cause ». Outre, l’extension du Golf « pour laquelle j’avais deux réunions publiques sur Saint-Saulve et Marly de 3 heures, mais également le volet habitat avec près de 1 000 logements (700 Marly et 300 Saint-Saulve), les bassins de rétention d’eau et le ruisseau du Grand Cavin à mettre en lumière ».

Enfin, le coup déjà parti, sur ce projet initié au tout début par Laurent Degallaix et accepté par Fabien Thiémé contre le boulevard éponyme aujourd’hui, a déjà « coûté beaucoup d’argent à Valenciennes Métropole (études, rachat de foncier…). A ce titre, la dernière briqueterie du Valenciennes a été fermée, 30 emplois, avec le rachat du terrain et une indemnité d’éviction pour le chef d’entreprise (et son plan de licenciement) », conclut-il sur ce point.

« Ce projet du Grand Cavin n’est pas mort », Yves Dusart

Pour sa part, Yves Dusart répond à l’édile sans agressivité : « Je pense que nous n’avons pas les mêmes informations sur ce dossier. Ce projet du Grand Cavin n’est pas mort. Evidemment, l’extension a 18 trous est remise en cause, mais un autre aménagement est possible, le chapitre logement et autres peuvent être revisités. Ensuite, on peut travailler en bonne intelligence. Fort de cet apport en population, je serai plus souple sur un nouveau projet Grand Cavin sur ce point. Enfin, si des promoteurs se désistent, d’autres viendront… », ajoute-il comme une main tendue à son collègue de Marly.

Enfin, Yves Dusart indique haut et fort » qu’à « aucun moment sur ce dossier, il n’a été question d’un projet contre un autre. Les services du Ministère de la Justice n’ont jamais présenté ce projet en supprimant un autre dossier sur le Valenciennois ». Toutefois, très logiquement, la reprise de terres agricoles est très réglementée en France, et plus encore depuis la loi ZAN (Zéro Artificialisation Nette) d’où la complexité de ce dossier.

« Plus de Giga Factory possible dans le Valenciennois », Jean-Noël Verfaillie

L’autre objet du courroux pour le maire de Marly est l’abandon d’une potentiel espace pour l’accueil d’une méga entreprise, notamment les fameux 50 hectares sur le PAVE 2 à Onnaing. « Nous avons déjà dû faire des aménagements tous azimuts pour intégrer les deux entreprises, Action (logistique) et Monin (Usine) afin de conserver 50 hectares pour une Giga Factory », tance le maire de Marly. « Là, compte tenu qu’à proximité d’un centre pénitentiaire, il n’est pas possible d’implanter ce type d’entreprise. Seul un village artisanal ou ce profil d’installation est dorénavant possible. Il n’y aura plus de Giga Factory possible dans le Valenciennois comme une usine de batterie électriques ou toute autre site industriel, car cet espace était destiné à une industrie lourde », ajoute-t-il. Deux cause nationales s’entrechoquent de facto dans ce dossier sur le Valenciennois, la souveraineté industrielle française, indispensable, et la surpopulation carcérale en France, insupportable !

Sur cette autre vive inquiétude, le maire de Saint-Saulve demeure sur la même ligne. « Je n’ai pas les mêmes informations que le maire de Marly sur ces 50 hectares. Pour moi, rien n’est arrêté là également »

Ensuite, un point de convergence entre les deux maires, l’annonce sur la page Facebook du maire d’un potentiel de 1 000 emplois surprend, pour un site logistique et Monin. Par ailleurs il ne fallait pas être grand clerc pour deviner l’intention de la communication sur ces implantations deux jours avant celle du Garde Des Sceaux.

« Pas de dépréciation foncière », Yves Dusart

Un autre volet de ce questionnement a été exposé en Conseil municipal avec de nombreux exemples sur la valeur du foncier « comme Poissy, Saint-Martin-de-Ré, voire Anneoulin où j’ai conversé avec le maire avant de donner l’accord de la commune. J’ai posé la question la plus importante- Si c’était à refaire, le referiez-vous ?, la réponse était sans ambiguïtés – Oui ! », commente Yves Dusart. « D’ailleurs sur Valenciennes, le foncier a-t-il baissé, malgré la Maison d’Arrêt dans la ville (mais après le canal de l’Escaut concrètement ) ? Il n’y a aucune dépréciation foncière  », interroge Loïc Ruol.

Ce sujet était très discuté sur les réseaux sociaux tout comme celui de la sécurité inhérente à l’implantation d’un centre de détention. « Là également, il n’y a pas plus de problèmes avec une prison que sans prison sur sa commune ». Sur un point de discussion entendu ce week-end, les fameux missiles comme dans l’environnement de la Maison d’arrêt de Valenciennes, le maire précise « la distance et la configuration du site rendront quasiment impossible tout lancement de projectile ».

Pour le reste, il avoue « que pour la 1ère fois, j’ai demandé à ma collègue de modérer les commentaires sur les réseaux sociaux, car certains racontaient n’importe quoi ! »

Aide financière

Evidemment, des recettes supplémentaires pour la commune sont également un pan de la validation de ce dossier par ladite commune. Outre les 70 000 euros (100 euros par détenu) annuel alloué dans la dotation globale (DGF), Yves Dusart rappelle les propos d’Eric Dupont-Moretti : « Le Garde des Sceaux indique que le Ministère de la Justice étudie une aide financière complémentaire (à la DGF) afin de soutenir les villes candidates ». Ce denier sera-t-il toujours en fonction après la remaniement ministériel annoncé, cela n’inquiète pas Yves Dusart « compte tenu que le dossier est dans les tuyaux », la fameuse continuité de l’Etat même si rien n’est figé sur aucun sujet durant une phase administrative.

Une localisation sans impact pour la population ?

Ensuite, le sujet de l’emplacement est central. « Evidemment, si ce centre de détention se positionnait à 300 mètres du centre ville, le sujet était différent. Là, nous sommes au bout du bout de Saint-Saulve, proche de la Zone Economique du PAVE 2 sur Onnaing. De plus, via une construction semi-enterrée, des merlons devant et un site arboré, la vue de l’équipement sera quasi nulle. Enfin, l’implantation du site « Action » et de Monin cachera ce site en terme visuel », explique le maire.

Puis, il rappelle un peu l’histoire locale où « nous avions eu des commentaire identiques à l’installation d’Ecovalor, les déchets… ! Qui se soucie de cette implication aujourd’hui ? ».

« Prévenu il y a huit jours », Jean-Noël Verfaillie

Après le fond, la forme n’est pas non plus un détail de l’histoire. Le maire de Marly est déballé par la méthode employée par les acteurs du projet. Au tout début, Valenciennes Métropole, en clair Laurent Degallaix, était seul avec le Ministère, puis « Laurent Degallaix m’a prévenu le 22 décembre 2022 du projet. Il ne m’a rien imposé, mais il y avait déjà 3 sites potentiels, Aubry-du-Hainaut, Famars, et Saultain. J’ai réfléchi avec des membres de la majorité, je me suis renseigné et informé sur d’autres communes dans la même configuration, et ensuite j’ai donné mon accord pour figurer dans les 4 sites potentiels sur Valenciennes Métropole. Dans la foulée, les réunions se sont élargies au maire d’Onnaing et maire d’Estreux », indique Yves Dusart.

De son coté, compte tenu de l’impact sur deux projets, avérés ou pas, le maire de Marly déplore « avoir été prévenu 8 jours avant. J’ai contacté le Préfet de Région afin de lui signifier que nous ne pouvions pas abandonner ces deux projets pour le développement économique du Valenciennois, sans omettre l’argent public déjà dépensé à cet effet ». On connaît la suite avec une publication sur Facebook du Président de Valenciennes Métropole (Action et Monin) et une manifestation sur le sujet « où je n’étais même pas convié (comme VP au développement économique et très actif sur ces dossiers) », ajoute-t-il.

Sur la forme, le premier magistrat de Saint-Saulve est sans ambiguïtés. « Nous ne pouvions pas communiquer publiquement sur un projet national. Non, je ne suis pas choqué par la méthode. Il fallait que ce projet demeure en petit comité. D’ailleurs, le Ministère de la Justice m’a demandé, voire réitéré encore et encore sa demande, afin de savoir si je n’avais pas changé d’avis compte tenu de nombreux revirements de maires dans une situation identique. C’est une décision courageuse, nécessaire et je serai le roi des c…  si nous avions refusé et laissé déplacer d’une centaine de mètres ce projet sur Estreux par exemple. On m’aurait encore reproché qu’un dossier passe à coté de notre commune ! », conclut Yves Dusart dans la «sérénité»  du bon choix, selon lui, pour sa commune

Le calendrier du projet du Centre pénitentiaire

Enfin, le dossier est encore dans les cartons puisque cette phase première phase n’est que le préciblage. Le calendrier est le suivant : Comité de pilotage en septembre 2023, phase de concertation publique obligatoire en 2024 et DUP (Déclaration d’utilité publique) en 2024/2025, puis période de conception, permis de construire instruit par la Préfecture et pas la commune (via Valenciennes Métropole), début des travaux en 2027 même si le Garde des Sceaux s’est voulu plus optimiste que ses services avec une ouverture en 2027, plutôt 2028/2029 pour ses services.

A l’heure d’un Bureau communautaire ce mardi 27 juin et d’une plénière, la question qui va assurément se poser à l’échelle d’une intercommunalité est à quel moment un sujet communal doit-il traverser la route pour devenir un partage communautaire, tout au moins sur l’informations en amont, dès lors que les dommages, ou pas, collatéraux sont potentiels ???

Enfin, on notera l’insistance, outre tous les chiffres déjà évoqués dans les éditions de la presse locale, du Garde des Sceaux sur la somme de 5 à 6 millions d’euros fléchés pour la rénovation de la Maison d’Arrêt de Valenciennes « dans un état déplorable », commente Loïc Ruol. D’aucuns pourraient penser que l’aménagement majuscule de l’entrée nord de Valenciennes, et le désir chevillé au corps du maire de Valenciennes d’atteindre les 50 000 habitants, conduirait à raser cette dernière pour des logements sachant que comme le Collège Watteau, une excuse technique et bâtimentaire, directe ou indirecte, sortie du chapeau est toujours sous le coude. On suivra de fait la réalité de cette annonce ministérielle très importante !

Daniel Carlier

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