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Roland Revel
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Affaire Roland Revel, délibéré le 30 août 2016

Audience très intense ce jeudi 07 juillet au TGI de Valenciennes concernant l’Affaire de l’ancien maire de Rosult ; ce dernier devant répondre en justice d’un harcèlement moral, présumé, sur plusieurs fonctionnaires de la commune et d’une agression sexuelle, présumée, sur une titulaire de la ville de Rosult.

Roland Revel

Affaire Roland Revel, audience de 6H30 au TGI de Valenciennes

Audience reportée durant l’automne pour cause de grève des avocats, puis reportée le 16 mars 2016 pour des ennuis de santé, cette étape au TGI de Valenciennes était attendue par tous les parties en présence : Roland Revel, ancien maire de Rosult, et les parties civiles, six plaignantes et l’association « Contre les violences faites aux femmes dans le travail« .

Dès l’entame de cette audience à 13H30, une surcharge de dossiers se fait jour. Le président de cette audience informe les avocats, prévenus etc. que ces dossiers seront reportés sur le fond car le dossier Revel va durer plusieurs heures. Fort de cette résolution, le procès Revel a débuté vers 16 H environ après avoir étudié les mesures de détention, contrôle judiciaire etc.

Les plaignantes à la barre

Les chefs d’accusation contre Roland Revel sont :

– Harcèlement moral/dégradations des conditions de travail pouvant porter atteinte aux droits, à la dignité, à la santé et à l’avenir professionnelle d’autrui/ six plaignantes.

– Agression sexuelle par une personne ayant autorité sur la victime/ une plaignante + association.

Chaque plaignante est appelée à la barre afin de confirmer, infirmer voire modifier sa déposition. La première à se présenter est Isabelle Dufour, celle qui a déposé la première plainte, le 08 février 2014, contre l’ancien maire de Rosult pour harcèlement moral et violence légère. Le fait générateur serait intervenu ce jour de février où une altercation verbale serait survenue entre Isabelle Dufour et Roland Revel, maire en fonction. Cette colère « physiquement impressionnante où il m’a dit-Ferme là, tu me dois le respect, je suis ton patron ! » Puis, l’échange verbale se serait enflammé avec des hurlements de M. Revel contre la plaignante et enfin, il aurait pris une feuille de papier pour la froisser et l’a jeté sur Isabelle Dufour. Sur l’aspect sonorité et « ses hurlements« , une constante chez toutes les plaignantes, Roland Revel a admis « je parle fort« .

Ensuite, elle relate d’autres propos (présumés) à son égard « t’es grillée, t’es foutue, je peux briser ta carrière« . Elle raconte ensuite d’autres phrases vexantes envers ses collègues de la mairie. Clairement, on perçoit un caractère fort avec une capacité de résistance « et je supportais de moins en moins ses agissements« . Cet incident du 08 février « c’est la goutte d’eau qui a fait débordé le vase » car la plainte précise les dates de ce harcèlement moral, du 08 février 2011 au 08 février 2014. Elle précise que cette situation au travail aurait eu des conséquences directes sur sa vie personnelle.

De suite, le Procureur lui demande « feriez-vous partie d’un complot politique à l’encontre de M Revel afin de lui ravir la mairie ? » Isabelle Dufour nie farouchement toute connotation politique concernant son action en justice en précisant toutefois que « ce n’était pas bonne nouvelle de le voir se représenter aux municipales de 2014« . Une juge la reprend « à cause de sa personnalité ou de son bord politique ? » Là également, Isabelle Dufour réfute farouchement tout lien politique dans cette affaire.

Pour la défense, Pascal Vanhelder, le bâtonnier, fait remarquer qu’Isabelle Dufour « a changé 6 fois de postes en 12 ans« .

Seconde plaignante, elle énumère les types de propos, présumés, de Roland Revel « des remarques blessantes comme-baudet, Roland Revel a un manque de respect, il est misogyne« . Pour sa défense, l’ancien maire avance « je suis exigeant, je vérifie que les employés arrivent à l’heure. Changer les choses ne plaît pas toujours« .

Une autre plaignante, présente depuis 1982 en mairie de Rosult « sans aucun problème avec les précédents maires mais depuis l’arrivée de M. Revel« . Une titulaire dont le stress au travail l’a conduit à se faire, volontairement, enfermée pendant 8 jours dans un établissement hospitalier sans aucun contact avec l’extérieur. Clairement, un Burn-Out extrême, une situation de mal être dans une ambiance générale très lourde.

Peu content du travail effectué par son équipe administrative, 3 à 4 personnes pour une trentaine d’employés en mairie, il n’a pourtant jamais fait part officiellement de son mécontentement. Le président du tribunal lui demande « pourquoi durant toutes ces années, pas de lettre d’avertissement, de sanctions si besoin dans un cadre légal ? » La réponse est terrible « si je l’avais fait, elle se serait sans doute suicidée« . Un mot grave qui ne passe pas du tout, le président fait noter à la greffière le propos et obtient des excuses « pour ces propos très déplacés« , souligne le président du tribunal. L’avocat de la défense dans sa plaidoirie reprend ce fait de séance « voyez ce qu’il est capable de dire à un magistrat du siège, alors dans un petit bureau…« . Même son défenseur a souligné ce propos « extraordinairement maladroit« .

Plaignante après plaignante, elles décrivent toutes le même climat dès que M.Revel est présent en mairie ! Petit florilège des réflexions, présumées, « baudet, tu as du fromage blanc ou du fromage dans la tête etc. « sans parler de propos, présumés, plus personnels « bouge ton gros cul« . Ce qui ressort de ces différents témoignages, réels ou pas, est la durée, la fréquence, l’implacable attitude de l’ancien maire, voire l’ingérence dans la vie privée, ce qui conduit invariablement « à venir travailler la boule au ventre« , souligne l’une d’entre elles. La continuité et la persistance de ce climat de mal-vivre ensemble est palpable, l’émotion des plaignantes à la barre, certaines n’ont pas pu retenir leurs larmes, interpelle à tel point qu’un avocat de la partie civile demande « M.Revel, comment avez-vous ressenti cette émotion ? » La réponse fut glaciale et froide faisant dire à l’avocat « vous n’avez aucune empathie M.Revel« .

Pour sa part, M.Revel se défend, outre la théorie du complot, en expliquant son goût du travail bien fait. Elu trois fois comme maire de la commune, personne ne l’a contesté, il s’est dépensé corps et âme pour ses administrés ; menant à bien des projets pour la commune et c’est pour cela qu’il fut de nouveau élu « mais à quel prix M. Revel pour votre équipe à la mairie« , demande un avocat. A ce titre, il a reçu des lettres de soutien, Daniel Mio, ancien directeur du PNR Scarpe Escaut voire de Monique Herbommez sur papier de la mairie, maire de Sars-et-Rosières, vice-présidente à la Porte du Hainaut et ex présidente de la CCRVS.

… Classée sans suite

Autre point important dans ce dossier, l’existence d’une plainte en 2010 pour le même type de comportement mais classée sans suite. « Je ne sais pas pourquoi cela fut le cas mais elle décrit le même type d’agissement. Après, c’était la liberté du procureure (Mme Alliot) de juger, ou non, de l’opportunité des poursuites« . Néanmoins, cette plainte constitue un point de départ sur lequel s’appuie le juge. « Vous nous parlez de complot politique en 2014 mais cette plainte décrit exactement le même type de comportement de votre part mais en 2010. Il faudrait imaginer un complot politique contre vous, 4 ans plus tôt et conçu par les plaignantes avec des parcours très différents« .

Expertise psychologique

A la demande du parquet, une expertise psychologique a été diligentée. Les conclusions du médecin expert sont tranchantes « egocentré, psychorigide avec une tendance narcissique« . Le président du tribunal commente cette expertise « c’est troublant par la concordance avec la personnalité décrite par les 6 plaignantes ! »

Médecine de la prévention

Point étonnant soulevé précisément par le Procureur de la République « vous n’avez pas signé de nouvelle convention avec le Centre de Gestion depuis août 2012 mettant fin, de fait, à la médecine de prévention pour les employés de la mairie« . Un élément tangible et incontestable, les agents municipaux ne pouvaient pas exposer un problème auprès de la médecine du travail. Pourquoi, voulait-on cacher une ambiance au sein de la municipalité ? Dans tous les cas, c’était un bon moyen d’y parvenir, voulu ou pas !

Le fait constitutif

La joute verbale entre le Procureur de la République, François Perain, et Pascal Vanhelder, avocat de Roland Revel, s’est portée sur un point juridique clé. En effet, pour que ces faits de harcèlement moral, extrêmement difficiles à prouver, soient constitués, il faut une répétition, une multiplicité dans la durée. Ainsi, le Procureur de la République ajoute des « S » à chaque référence car le pluriel est une preuve de ce délit. Dans sa réquisition, il argumente sur le texte de loi qui est très clair et qui n’oblige pas une dégradation de la santé pour être constitutif. « Une agression répétée contre la dignité« … »ce ne sont pas des faits isolés, c’est faux !« … »Le pouvoir n’autorise pas ces comportements de la part d’un élu« , assène-t-il !

Au contraire, Pascal Vanhelder, affirme que ce n’est qu’un acte isolé : « Un seul fait est reproché-Ferme là, tu me dois le respect, je suis ton patron- et c’est tout, c’est un acte isolé et pour le reste, ce sont des vagues accusations. C’est un maire à l’ancienne, il a du caractère et il est surtout très apprécié des habitants qui ont élu trois fois Roland Revel au poste de premier magistrat« , souligne-t-il. Son raisonnement est pour lui infaillible et ne peut que conduire à : « M. Le président, vous avez une démarche juridique à faire qui ne peut que vous emmenez dans l’impasse juridique, je demande la relax pour mon client pour le chef d’accusation du harcèlement moral et d’agression sexuelle.  »

Sur l’agression sexuelle

Cette fois, c’est une seule plaignante qui a déposé plainte pour des actes répétés, plus d’une dizaine de fois, d’agression sexuelle de caresse sur la poitrine et sur le sexe : « J’étais tétanisée, sidérée, je ne pouvais plus bouger. Tout est parti d’une phrase que je n’ai pas relevé« , dit-elle avec une pointe de regret. « Sois gentille avec moi, je serai gentil avec toi et tout est parti de là, il a dû croire que j’étais favorable à ce genre de comportement« .

Roland Revel rétorque « c’était une simple tape dans le dos amicale » et le bâtonnier évoque des allégations « très infamantes à l’égard de mon client déjà très malade ! »

Suite à ces attouchements présumés, la plaignante concernée à contacter une association afin de l’aider dans cette situation difficile. « J’ai pu obtenir un nouveau poste au sein de la mairie qui n’était plus en contact direct avec le maire. J’étais en sécurité ! »

Le Ministère public rappelle que la plaignante a prévenu son mari avec une extrême réticence « j’avais honte« , dit-elle ! Et le dit mari est venu trouver le maire chez lui, cela s’est mal passé. Pourtant Roland Revel n’ a pas porté plainte, il ne voulait peut être pas que l’on pose des questions ?

Les conclusions

Au niveau pénal, le Procureur de la République a demandé un an de prison avec sursis et une perte des droits civiques, civils et de famille. Un point éclairant la situation actuelle car « s’il n’ambitionne plus de se représenter à 72 ans et surtout malade« , précise le bâtonnier… néanmoins le conseil municipal de Rosult a une fâcheuse tendance à alimenter les faits divers !!! Durant son réquisitoire, il déclare sur un ton très solennel  » Bravo Mesdames, quel courage ! »

Au niveau des parties civiles, toutes confondues, elles réclament environ 125 000 €. Pour la juriste de l’association, intervenant pour l’agression sexuelle, elle a évoqué l’expérience de l’association en la matière : « A chaque fois que cela se passe dans une collectivité. On évoque toujours la théorie du complot. Ensuite, il joue toujours sur les mêmes cartes, une situation de fragilité, un divorce, un décès, un enfant malade, un problème financier etc. pour arriver à ses fins« . Elle décrit les hurlements de Roland Revel  » dignes de la Gestapo » mot malheureux car elle se situait au Lycée Watteau, une plaque commémorative y figure, et pas rue Capron à Valenciennes en 2016. Un échange très très vif entre Pascal Vanhelder et la juriste a fait suite, incident clos, l’audience s’est poursuivie.

Cet épiphénomène montre à quel point toute l’assemblée était à cran au fur et à mesure de l’audience, témoignage après témoignage où le Président du Tribunal interpelle Roland Revel durant le 1er témoignage »arrêtez votre attitude ironique, cela va agacer tout le monde ! »

Voilà volontairement dans le désordre cette audience atypique, troublante à plus d’un titre où les pièces d’un puzzle se sont rassemblées à travers une petite communauté de vie administrative complètement chamboulée venant s’expliquer à la barre d’un tribunal. Simulatrices ou victimes avérées d’un harcèlement moral sur la durée voire d’agression sexuelle pour une victime, on est perturbé dans l’auditoire et il est 22H30. La seule certitude que l’on peut avancer est que rien ne sera plus pareil à Rosult.

Le Tribunal correctionnel de Valenciennes rendra son délibéré le 30 août 2016

 

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