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Conflit ouvert au Centre d’Education à l’Environnement d’Amaury

Avis technique, sidération, sécurisation des bâtiments pouvant accueillir du public, incrédulité de l’association A.D.E.P.S.E, souffrance des salariés, émotion, fermeture et démolition envisagée du Centre d’Education à l’Environnement d’Amaury sur Hergnies, voilà un résumé imparfait de cette page d’histoire pour la commune accueillante, mais également pour la population d’un territoire où chacun d’entre nous a un souvenir aux abords de ce plan d’eau issu d’un affaissement minier (visuel du 10 janvier 2023).

(Réunion du collectif le mercredi 10 janvier 2023)

Principe de réalité du PNRSE versus préservation d’un site fixe dédié au Centre d’Education à l’Environnement

Les prises de positions sont tellement éloignées entre les parties concernées qu’il faut prendre du recul, dézoomer pour mieux comprendre les enjeux d’un Parc Naturel Régional Scarpe Escaut historique, soutenu par le Conseil régional Hauts de France, et d’une association, l’ A.D.E.P.S.E en charge du Centre d’Education à l’Environnement d’Amaury sur Hergnies et de La Maison de la Forêt sur Raismes. A ce stade, une convention entre A.D.E.P.S.E et le PNRSE est active jusqu’au 31 décembre 2024 avec une subvention fléchée, certes des besoins évidents en travaux, mais sans obligation formelle sur ladite convention. Cette dernière est à dissocier du renouvellement de la Charte du Parc Régional Scarpe Escaut, prévue au 01 septembre 2025 même si une prolongation de la Charte existante, sur 15 ans, sera inévitable dans l’attente d’un décret « probablement en 2026 », mentionne Isabelle Zarlanga, la Directrice du PNRSE.

Mercredi 10 janvier, le Collectif de soutien au Centre d’Amaury a convié la presse locale en présence du maire de Hergnies, Jacques Schneider des membres de l’association A.D.EP.S.E, Mathilde Valembois, suppléante du député Fabien Roussel, des habitants et habitantes et presque la totalité de ses salariés, sans oublier le club de voile. Là, les parties en présence ont exprimé leur désarroi profond face au projet de destruction pure et simple de l’ensemble des bâtis, construits dans les années 80 avec les normes de l’époque, et un projet de renaturation très en vogue dans les collectivités territoriales. Jacky Hoogers, membre de ce collectif, a brossé succinctement ce moment singulier où en quelques semaines, le destin d’un espace bâtimentaire s’envole, sa mission s’efface ou se reconstruit, et une vive émotion envahit un territoire résilient, chacun le sait !

Ensuite, la temporalité ajoute à ce sentiment de zapping d’un Centre d’Education à l’Environnement d’Amaury sur Hergnies puisqu’un « Avis technique sur structure existante » d’un Bureau d’Etudes, ETBA Nord qualifié sur les Techniques Béton Armé, a rendu « un pré-rapport suite à sa visite début juin 2023 du Centre d’Amaury. Ce dernier préconisait un arrêté de péril imminent sur l’ensemble du site », souligne Isabelle Zarlanga. Tout cela après un Conseil d’Administration de l’A.D.E.PS.E le 15 mai 2023, avec des représentants du PNRSE présents, où les projets 2023, un retour sur l’année 2022, étaient sur la table comme une gestion des affaires courantes, aucune alerte en urgence en amont.

 

« Les conditions de sécurité des sorties de secours sont les plus drastiques », Grégory Lelong

Le maire de Hernies rappelle que « compte tenu que le PNRSE est le propriétaire unique des des bâtiments, le maire n’a pas le choix de signer cet arrêté de péril sous réserve d’engager sa propre responsabilité ». Pour sa part, le président du Parc régional, le maire de Condé sur l’Escaut, met en exergue qu’en cas d’accident : « Les juges vont s’appuyer sur le rapport le plus exigent en terme de sécurité. L’incendie, l’été dernier, dans un gîte a influencé toutes les structures d’accueil ». Incontestablement, ce grave accident  sur Wintzenheim (Haut-Rhin) avec 11 victimes, une mise en examen pour homicide involontaire pour la gérante, a traumatisé tous les établissements dédiés en France et serré plus encore les conditions d’accueil en France.

Concrètement, cette structure bâtimentaire est composée de 5 éléments reliés entre eux, une particularité négative in fine, plus un site pour le club de voile très dégradé. Une conception reposant sur des pieux profonds, autour d’un mélange de bois et de béton. Au premier coup d’oeil sur site (le 10 janvier 2023), vous constatez un vieillissement réel de la partie bois, une matière vivante par essence. La Directrice précise un point technique : « Les bâtiments sont reliés entre eux », car une salariée indique qu’un bâtiment proposant 46 hébergements, avec une toiture et des douches neuves, est quasi intacte. Oui, si à l’origine l’édification des 5 bâtiments avait été réfléchi de manière indépendante, nous ne serions pas dans cette éradication globale du site. De plus, Grégory Lelong ajoute que « les conditions de sécurité des sorties de secours sont les plus drastiques pour les sites ERP (Etablissement Recevant du Public) ».

Ancien bâtiment du club de voile

Sur ce même site, le bâti consacré au club de voile est en grande souffrance. « J’ai clairement indiqué à l’association de voile qu’il ne pourrait plus utiliser ce site, il sera détruit. Par contre, la pratique de la voile n’est pas du tout remise en cause sur le site d’Amaury avec un lieu de stockage délocalisée », ajoute Isabelle Zarlanga.

« Nous souhaitons un rapport d’expertise indépendant », Thomas Devillers

Ensuite, quelques semaines plus tard, le rapport tombait le 10 juillet 2023. Toutefois, ce dernier est contesté par plusieurs membres actuels ou anciens de l’ A.D.E.P.S.E : « Ce n’est qu’un avis technique, nous souhaitons un rapport d’expertise indépendant sur l’état bâtimentaire de ce site. Nous irons, si besoin est, en justice pour l’obtenir. Ce rapport n’a à aucun moment prôné la destruction des bâtiments (sans reconstruction). A ce stade, le président du PNRSE a refusé cette initiative », commente Thomas Devillers, ex membre de l’association. Voici le rapport d’ETBA nord, indispensable à la compréhension des enjeux (Rapport d’expertise 2023 CEE d’Amaury à HERGNIES – PNRSE (5).

Dans la foulée, la fermeture en deux temps du site où les mesures conservatoires n’ont pas toutes été prises immédiatement, la Directrice du PNRSE se défend : « Nous sommes une petite structure, nous avons contacté la commune et dû acheter des barrières pour une mise en sécurité (complète le 27 juillet 2023) ».

Concomitamment, suite à une réunion en juillet 2023 avec tous les acteurs concernés, la nouvelle tombe en septembre 2023 « brutalement. Le Centre sera rasé. Les 7 salariés qui restent ne savent toujours pas quel sera leur sort », demandait Julien Poix à l’occasion d’une question orale au Conseil régional Hauts-de-France. « Nous apprenons dans la presse cette fermeture du Centre d’Amaury. Cette situation est inacceptable », s’exclame une salariée de l’A.D.EP.S.E présente à cette réunion du 10 janvier 2024. 

Ce timing très serré dans la prise de décision, et l’annonce d’un projet sur cette zone humide de l’étang d’Amaury, électrise la situation concernant un site historique faisant partie d’un paysage environnemental reconnu. En effet, le message est clair et sans concession à travers un projet « de renaturation portée par le Conseil département du Nord sur un Espace Naturel Sensible, suite à une opération de démolition complète conduite par le trio/ EPF (Etablissement Public Foncier), Le Conseil départemental du Nord, et le PNRSE », précise Isabelle Zarlanga. Grégory Lelong ajoute qu’un projet plus global sur le bassin minier, avec la Mission Bassin Minier, concernera le site d’Amaury, celui de Chabaud Latour, voire en Belgique pour l’Education à l’environnement.

« Je suis défavorable au projet de renaturation », Jacques Schneider

Toutefois, il faut souligner les propositions du Maire d’Hergnies, car Jacques Schneider a énuméré ses initiatives afin de poursuivre l’activité. Rien n’y a fait, car ces palliatifs ne pouvaient résoudre le problème de fond, l’état bâtimentaire du site au global. Par ailleurs, l’édile de Hergnies « valide l’avis technique du Bureau d’études ETBA Nord. Je ne souhaite pas une nouvelle expertise. Par contre, je suis défavorable au projet de renaturation, mais plutôt un bâti réduit pour l’accueil, type Ramsar dédié aux zones humides ».

Pour conclure sur ce calendrier 2023, une réunion avec tous les institutionnels s’est déroulée en octobre 2023 où « nous avons été prévenus le vendredi pour le lundi. On ne voulait pas que Fabien Roussel soit présent », tacle Mathilde Valembois. Une réunion importante où le « rapport du Bureau d’études ETBA Nord a été validé, y compris par le maire d’Hergnies », précise le Président du PNRSE.

Défaut d’entretien ou vétusté naturelle ?

Pour rappel, il n’y a plus de direction au sein de l’ A.D.E.P.S.E depuis novembre 2022. Chaque année, l’association devait proposer un besoin en travaux sur ce Centre d’Education à l’Environnement d’Amaury. « Sur dix ans, le PNRSE  a investi 650 000 euros en travaux d’investissement sur Amaury auxquels s’ajoutent une dotation annuelle de fonctionnement de 209 000 euros », explique Isabelle Zarlanga. 

Bien sûr, on peut se questionner sur un non choix d’une rénovation plus précoce à travers un PPI (Plan Pluriannuel d’Investissement) notamment des terrasses et des solives, car les initiés des intercommunalités savent que, même dans le Valenciennois, des sites plus dégradés, plus vétustes, ont été sauvés sur l’autel de l’intérêt général. Toutefois, tout à un coût dans le tuyau unique de l’argent public. « Le cabinet DIENTRE a établi un estimatif prévisionnel de coût pour le maintien du centre tel qu’il existe : 7 675 212 €HT (démolition y compris désamiantage ; renforcements structurels ; travaux y compris travaux de performance énergétique ; démolition et reconstruction des bâtiments « voilerie » et « cyclotourisme). Ensuite, il a également émis un estimatif pour la refonte du site pour un financement nécessaire de 8 783 981 € HT (démolition de l’ensemble et reconstruction) », déclare Isabelle Zarlanga. Comme toujours, construire à neuf coûte moins cher que de réhabiliter.

Management en question ?

Un point central de ce dossier réside dans l’avenir de l’actif humain de l’A.D.E.PS.E. A ce stade, la commune de Hergnies a pris en charge un local, de 25 M2, pour héberger les salariés. Cette situation est mal vécue. « Nous avons eu un peu d’activité en août/septembre, mais depuis des mois plus rien. Nous ne savons pas quoi faire, ce que nous allons devenir. Clairement, nous sommes en souffrance psychologique », tacle une salariée de l’association.

Sur ce volet, le maire d’Hergnies annonce « que des licenciements économiques interviendront dans les prochains mois » compte tenu de la fin de convention entre l’A.D.E.PS.E et le Parc Naturel régional Scarpe Escaut. Sur ce point précis, le maire de Condé s’étonne « de cette absence d’informations aux salariés dès le mois de juillet. Jacques Schneider a assisté à cette réunion où les choses étaient déjà très claires. La rénovation du Centre d’Education à l’Environnement d’Amaury est impensable. Le PNRSE n’a pas les moyens de financer la reconstruction bâtimentaire du Centre de l’Education à l’Environnement, ni ailleurs ». 

Conflit d’intérêt ?

Effectivement, la double casquette de Grégory Lelong, comme Président du PNRSE et maire de Condé-sur-l’Escaut, ne passe pas inaperçue et constitue une tension supplémentaire dans l’hypothèse d’un transfert présumé du Centre de l’Education à l’Environnement sur le site de Chabaud Latour. Le maire répond tout de go et sans ambiguïtés : « Je n’ai aucune intention de transférer un site physique sur Chabaud-Latour. Néanmoins, cette pédagogie ne disparaît pas avec la destruction du site d’Amaury. Elle peut se dessiner autrement sur le même espace naturel et les autres environnants. Je comprends très bien l’émotion suscitée par cette fermeture validée par l’ensemble du Bureau du PNRSE ». 

A ce stade, la Charte actuel du PNRSE, et son article 4, mentionne clairement « cette éducation sera aussi relayée par le réseau des partenaires et équipements éducatifs (et par suite de l’entretien de ces derniers) ». Néanmoins, le maire enfonce le clou, le porteur de projet, en l’occurence le Conseil département du Nord « n’a plus la vocation de gérer des installations bâtimentaires comme l’a démontré la vente du site de Val Joly », précise le maire de Condé-sur-l’Escaut. Ce propos est appuyé par la Directrice du PNRSE : « J’ai une équipe réduite de 40 agents et 3 millions d’euros de budget annuel. Notre mission première n’est pas de gérer des bâtiments ».

En quatre mois, la messe serait dite concernant la fermeture du site physique du Centre d’Amaury, très rude et source d’émotion pour la population locale et les personnes ressources concernées ! Néanmoins, l’histoire n’est pas finie et le Collectif de soutien au Centre Amaury organise une mobilisation le samedi 20 janvier, à 10H30, avec un point de RDV Place de la République sur Hergnies.

Daniel Carlier

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