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Comprendre les équilibres politiques (improbables) à l’Assemblée nationale

Après un mois de juillet électrique à l’Assemblée nationale où l’opposition (réunie) majoritaire et la majorité relative du Gouvernement ont ferraillé pied à pied sur chaque texte de loi. Quels sont les enseignements concernant le vote des 3 textes de lois passés, sanitaire, pouvoir d’achat, et modification budgétaire associée à ces mesures en faveur du pouvoir d’achat ? Quelle stratégie le gouvernement peut-il adopter à la veille de l’étude du PLF 2023 (Projet de Loi de Finance ) ? Ce casting parlementaire 2022 peut-il durer tout un mandat sans une dissolution de l’Assemblée nationale ?

On l’avait presque oublié, le Parlement peut jouer son propre rôle dans le vote des lois sans suivre aveuglément un exécutif doté d’une majorité absolue. Que ce soit sous Nicolas Sarkozy, François Hollande ou encore Emmanuel Macron, les majorités absolues ont validé dans notre inconscient collectif qu’une loi était proposée exclusivement par le Gouvernement comme un chèque en blanc signé au préalable par une majorité absolue de députés. Rôle très ingrat pour ces élus de la République, mais l’émergence d’une majorité relative a renoué avec la vertu du débat parlementaire que ce soit à l’Assemblée nationale tout en attribuant un destin nouveau au Sénat dont l’élection au suffrage indirect en septembre 2023 sera d’une importance inédite.

Il faut bien l’avouer, le Gouvernement d’Élisabeth Borne aurait signé fin juin pour l’adoption de 3 textes de lois fin juillet. En effet, le contexte politique de la NUPES révolutionne l’hémicycle parlementaire, car la gauche impose ses marqueurs afin de peser le plus possible sur les articles de lois, mais affiche également, notamment La France Insoumise, le secret espoir d’une dissolution rapide de cette Assemblée nationale.

Bien sûr, de l’autre coté, le maintien d’un Groupe parlementaire de 89 députés par le Rassemblement National, avec deux vice-présidences, amène exactement le calcul opposé. Dans cette optique, le RN enfile le costume de la respectabilité, affiche une crédibilité politique, et fera tout pour maintenir ce résultat législatif inespéré. La volonté de renverser la table une fois de plus s’oppose à la peur de ne plus réaliser cette percée improbable dans les urnes, voilà le premier atout de taille pour l’exécutif. Emmanuel Macron peut compter sur les intérêts individuels des élu.e.s pour récupérer des voix, ici et là, lui permettant de valider des textes de lois.

Ensuite, le parti Les Républicains (62 députés avec les apparentés) demeure le soutien naturel du Gouvernement d’Elizabeth Borne, mais on n’oublie pas les indépendants (16 députés). Nous l’avons observé sur les 3 textes de lois, l’apport de la droite et de la droite radicale a permis au Gouvernement de passer l’immense majorité de ces textes. Le grand changement réside dans le vote d’articles nouveaux présentés par les députés de l’opposition ou d’une modification d’un article présenté par le Gouvernement contre l’avis de l’exécutif. La majorité relative a pris un sens éclatant, et peu importe sur le fond le bien-fondé ou pas, la démocratie parlementaire tirent sa résilience (ci-dessous, les forces politiques en présence de l’Assemblée nationale).

Le PLF 2023, l’instant clé de l’automne

Chaque élu d’une commune sait pertinemment que l’instant démocratique le plus important de l’année passe par le débat budgétaire, parfois tronqué, mais existant ! Le PLF 2023 sera assurément un temps fort de ce second quinquennat d’Emmanuel Macron. Attention, un Projet de Loi de Finances n’est pas une loi comme les autres, il répond à des critères très stricts ( https://www2.assemblee-nationale.fr/decouvrir-l-assemblee/role-et-pouvoirs-de-l-assemblee-nationale/les-fonctions-de-l-assemblee-nationale/les-fonctions-legislatives/l-examen-parlementaire-des-lois-de-finances).

Comment le Gouvernement peut-il espérer le vote du budget par un groupe d’opposition sachant que le plus modeste élu d’opposition d’une commune de France sait que seul le vote contre, voire l’abstention, permet à un opposant d’exister dans le futur politique. Voter un budget serait un boulet politique quel que soit la formation politique d’opposition. Par contre, l’abstention par peur d’une dissolution n’est pas totalement à balayer du revers de la main. En clair, la Première Ministre peut viser un compromis compliqué avec un Groupe parlementaire lui assurant la majorité, soit la peur du vide pour des députés fraîchement nommés via l’abstention, et enfin l’utilisation de l’article 49 alinéa 3 (49.3) de la Constitution afin de permettre l’adoption sans vote d’une loi.

Une dissolution, stop ou encore

La réflexion peut paraître très simpliste, mais ce temps parlementaire croise les J.O en juillet 2024. Le Président de la République prendrait-il le risque d’afficher aux yeux du monde une instabilité politique en France, dotée d’un régime où les pouvoirs du Président sont enviés par tous les autres dirigeants ?

Avant ces J.O 2024, vous avez deux sessions parlementaires et une élection européenne (juin 2024). La cohésion des alliances politiques au sein de l’Assemblée nationale sera d’ailleurs à l’épreuve durant cette joute européenne dans toutes les formations politiques, les plus évidentes comme la NUPES, mais pas seulement… En tout état de cause, l’obligation d’une dissolution dès cette première session 2022/2023 serait un aveu d’échec pour le Président sortant sur sa capacité à construire des compromis politiques. Ensuite, une dissolution avec des élections législatives quelques mois plus tard, à la veille des Jeux Olympiques, serait en l’espèce un caillou dans la chaussure du Président de la République.

Après cet événement planétaire, tout peut changer suivant l’évolution des crises nationales et internationales. Incontestablement, le temps travaille en faveur du Président sortant, mais plus candidat en 2027, car les ambitions des candidat.e.s putatifs sont la clé. Si un ou une leader imprime une puissance politique  pouvant amener Emmanuel Macron à la dissolution, cela se fera. Néanmoins, à ce stade, aucun politique ne mène le bal, chacun joue sa partition au bénéfice des Françaises et des Français diront certains, malgré eux noteront d’autres citoyens.

Daniel Carlier

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